Recherche...

Entretien avec
Martin Pachy


Martin Pachy

Son nom ne vous dira rien et pourtant, si comme nous il vous arrive de regarder des "2-en-1" ninjas en anglais, vous avez déjà sans doute entendu sa voix. Martin Pachy a en effet adapté et doublé un grand nombre de films, à l'époque où il était expatrié à Hong Kong : des classiques du Wuxia Pian et du polar hard-boiled, mais aussi... beaucoup de films de Godfrey Ho, ou pour Godfrey Ho. Cet entretien en français était l'occasion d'en apprendre un peu plus sur les conditions de doublage de ces films qu'on connaît si bien, sur la communauté des expatriés dans le HK des années 80-90, et sur les méthodes de travail du réalisateur-maison d'IFD.

Interview menée en avril 2013 par John Nada


Dans quelles circonstances vous êtes vous retrouvé à travailler comme doubleur pour le cinéma et la télévision à Hong Kong ?

En fait, je me trouvais en Angleterre après deux ans de voyage en Asie et en Australie, suivis d'une saison en station de ski. J'étais en recherche d'emploi et je devais me décider entre reprendre ma carrière dans la logistique ou trouver une nouvelle voie. Un ami rencontré en Inde me téléphone alors et me dit qu'il y a du travail à Hong Kong pour les Européens. Comme je n'avais rien d'autre à faire, j'ai emprunté de l'argent et je suis parti. Par la suite, l'offre de travail ne s'est pas concrétisée et j'ai dû trouver autre chose sur place. Possédant un passeport britannique, je n'ai pas eu besoin de visa et j'ai donc commencé par donner des cours d'anglais pour 2 euros de l'heure - à peine suffisant pour payer ma piaule à l'hostel [NdlR : auberge de jeunesse pour routards]. C'est finalement dans ce même hostel que j'ai rencontré une Française qui faisait des doublages et elle m'a dit qu'ils cherchaient des doubleurs francophones. Une semaine après, j'entamais ma « carrière » de doubleur !

Le doublage requiert évidemment certaines compétences, à la fois d'un point de vue technique mais aussi dans l'intensité du jeu. Est-ce que vous avez été formé comme ça, sur le tas ? A part le fait d'être anglophone ou francophone, quels étaient les critères de recrutement ?

Je n'avais jamais fait de théâtre et ma voix n'avait rien de spécial. Heureusement, je suis tombé sur une boîte de doublage sérieuse, qui deviendra plus tard Omni Productions sous la houlette de Rik Thomas, et qui était prête à former les doubleurs. Il fallait reproduire le ton de la voix de l'acteur et l'émotion tout en faisant coller le texte aux mouvements des lèvres. Mais le critère le plus important, c’était la rapidité : arriver à travailler vite, sans s’arrêter, c’est-à-dire sans faire d’erreur. Certains captaient le truc très vite, d’autres pas.

Pour nous autres doubleurs francophones, qui étions pour la plupart des amateurs formés sur le tas, le doublage d'un film de 90 minutes prenait deux jours, alors que la version anglaise du même film ne prenait qu'une journée. Nous étions une bande très éclectique, dans laquelle on trouvait des pions du lycée international, des gens de passage à Hong Kong, un restaurateur… Plus tard, je suis passé à l'écriture des dialogues. Personne ne voulait le faire car ça demandait énormément de concentration pendant de longues heures. J'en ai fait mon métier jusqu'à mon départ en 1998.


Quels types de programmes est-ce que vous doubliez à l'époque ?

J'ai doublé (en anglais cette fois) des séries TV, des documentaires NHK et des centaines de films - entre 250 et 300 je dirais : beaucoup de films avec Godfrey Ho, mais aussi d'autres de "meilleur" niveau comme "Vivre" de Yang Zhi Mou ou "Chungking Express" de Wong Kar Wai. En fait, quand j'y pense, j'ai doublé pas mal de classiques du cinéma hongkongais : "Aces Go Places" [NdlR : "Mad Mission" en France], "A Better Tomorrow" [NdlR : alias "Le Syndicat du crime"], "City On Fire", "Police Story", "God of Gamblers"... avec des acteurs tels que Jackie Chan, Tony Cheung, Andy Lau, Chow Yun Fat, George Lam, Richard Ng, Anthony Wong et l'excellent Stephen Chow. J'ai également doublé les films Godzilla pour la Toho, et écrit les scripts.

Et quand vous étiez doubleur sous la supervision de Godfrey Ho, comment se passait le boulot ?

Quand Godfrey Ho avait un film à doubler, il rassemblait une équipe et on doublait un film en 7 ou 8 heures avec seulement 3 ou 4 doubleurs (voire 6 s'il avait un "gros budget" = quasiment jamais) dans un minuscule studio le plus souvent à Mongkok. Sa phrase légendaire, lorsqu'il re-visionnait la scène qu'on venait de doubler - et avec son accent chinois - c'était : "80 percent, but good enough for me". C'est devenu une phrase culte parmi les doubleurs de l'époque, et je la ressors souvent quand je fais du bricolage !

A Hong Kong, il y avait deux équipes de doublage qui bossaient à l'époque, l'équipe A et l'équipe B. L'équipe A était composée des plus "pros", souvent issus de la télé ou radio ou qui avaient une expérience du cinéma ou théâtre. Ils travaillaient quasi uniquement sur les films et séries haut de gamme. L'équipe B était elle composée de doubleurs moins chevronnés et surtout un peu moins chers ! Selon les besoins, les doubleurs passaient de l'une à l'autre. Godfrey utilisait surtout les doubleurs de l'équipe B.


Concernant ces doublages avec Godfrey Ho, la firme pour laquelle vous travailliez était-elle Adda Audio Visual Ltd ou IFD ?

Je ne saurais pas dire de quelle société il s'agissait. Tout ce que je peux dire, c'est que ces films qu'on doublait pour Godfrey étaient pour la plupart des films de guerre, des films d'épouvante / fantastique et bien sûr des films de ninja, et qu'on était toujours payés cash, soit par la personne qui supervisait le doublage, soit par Godfrey lui-même. J'ai bien travaillé aussi sur des dessins animés pour IFD, et je suis allé plusieurs fois dans leurs locaux au Garley Building, mais je ne connaissais pas les grands chefs. En général j'avais à faire à une collègue de Godfrey qui s'appelait May, ou bien à un certain Steven So (?).

Ah oui, on connaît bien ces dessins animés de chez IFD ! Ce sont vraiment des produits bas de gamme, les proportions y sont très aléatoires, les faux raccords sont légions, y a plein de personnages dont le look est pompé sur des animés japonais ou des comics américains, et on ne sait pas ce que ça donne en anglais mais les doublages en français sont complètement fous !

En ce qui concerne les DA, c'était vraiment au tout début, alors que je commençais tout juste à doubler les films en français. J'avais contacté IFD (ou ils m'avaient contacté...?) et on m'a présenté May qui travaillait avec Godfrey. Elle mettait en place une équipe pour doubler des dessins animés et recrutait des doubleurs anglophones. L'équipe finale était composée de diverses nationalités et compétences (un des types était quasiment illettré...).

Le studio était situé dans un appartement au 1er ou 2ème étage sur Prince Edward Road. Je me souviens qu'on repérait l'appartement à une maquette de 747 fixée sur le grillage de la fenêtre. Le type avait converti son salon en studio de doublage. Le matériel d'enregistrement était dans la cuisine je crois. C'était avant le doublage sur U-matic, on travaillait "à l'ancienne" sur du 35 mm découpé en "loops" et on devait souvent s'arrêter pour laisser passer le bus, parce que l'insonorisation n'était vraiment pas au top. Pour faire les voix de robot ou bien une voix "téléphone", on nous donnait un gobelet ou une boîte de conserve à mettre devant la bouche pour faire "écho". Le résultat était vraiment mauvais.


Ces dessins animés se passaient souvent dans l'espace, et avaient des titres interchangeables comme "Les Aventuriers de la galaxie", "Les Aventuriers du système solaire", "Le Capitaine Cosmos", "Les Transformeurs de l'espace", "Les Conquérants du cosmos", Les Défenseurs de l'espace", "Les Protecteurs de l'univers" etc.

Je ne me rappelle pas des titres des films, mais c'était dans ce goût là ! De mémoire, on en a fait 4 ou 5, c'est tout.

Et sinon, avez-vous aussi bossé pour Tomas Tang de Filmark ?

Non, mais d'après mon ami Rik Thomas (qui avec son épouse était patron et fondateur d'Omni Productions, avant de revendre la société au début des années 2000), Tomas Tang l'appelait de temps en temps pour demander combien il prendrait pour doubler un film. C'était impossible de répondre bien sûr, parce que ça dépend de la durée du film, du nombre d'acteurs, de la quantité de dialogues etc. Donc Rik prenait un chiffre aléatoire et annonçait le prix à Tomas Tang, en prenant soin de mettre le haut-parleur pour l'entendre tomber de sa chaise en marmottant sa phrase standard "Velly, velly expensive!".

Nous connaissons quelques noms d'Occidentaux qui ont travaillé comme doubleurs pour Godfrey Ho : Stuart Onslow-Smith, Pierre Tremblay (que nous avons tous les deux interviewés), Mark Malloy, John Culkin... Avez-vous rencontré ces personnes, et si oui quels souvenirs gardez-vous d'eux ?

J'ai beaucoup travaillé avec Stuart et Pierre. Ils faisaient partie de l'équipe « A », les doubleurs les plus rapides. Tous les deux très sympas. Pierre était voisin de village à une époque. C'est quelqu'un qui a une connaissance extraordinaire de la musique, surtout le blues, jazz etc. D'ailleurs il est toujours DJ sur RTHK. Je vous conseille d'écouter son show sur Internet !

Mark vivait également dans le même village, il lui arrivait toujours des histoires pas possibles. Il a eu des petits rôles dans pas mal de films. Son père était directeur des stups je crois à Hong Kong et sa mère française. Apparemment, il habiterait dans le sud-ouest de la France maintenant.

John Culkin - ou "Culks" comme on l'appelait - était la voix de Richard Harrison, et également d'Andy Lau. Mike Swift, un autre doubleur vedette, faisait la voix de Tony Leung dans les films où ils jouaient ensemble, et tous les deux formaient un duo d'enfer ! Culks vit encore à Hong Kong et comme Pierre, il travaille comme DJ sur RTHK. Encore un type super sympa.

John Culkin dans "Magnum Thunderbolt", un 2-en-1 de chez IFD avec Phillip Ko et John Ladalski.

Il y a aussi Pedro Massobrio, un ressortissant sud-américain familier des "2-en-1", dont Grant Temple nous a dit qu'il était en charge des doublages pour IFD et Filmark. Il était souvent crédité en tant que "Pedro Ernyes" chez IFD et "Pedro Hughes" chez Filmark.

Je connaissais assez bien Pedro, qui était argentin si je ne me trompe pas [Nanarland : il serait en fait originaire d'Uruguay]. Ne pouvant doubler à cause de son accent, il s'était fait une place en tant que « directeur de doublage ». Parfois les doubleurs râlaient parce qu'il les payait plusieurs semaines plus tard, mais il était toujours réglo. C'est lui qui m'avait appelé pour travailler comme figurant dans "Project A Part II" [NdlR : "Le marin des mers de Chine 2"]. D'ailleurs, on le voit en train de danser dans une scène du film avec une fille qui avait un peu abusé de certaines substances et était complètement HS. Il a passé 4 heures à la tenir debout !

Pedro Massobrio (alias Pedro Ernyes alias Pedro Hughes).

Vous êtes français, mais avez doublé ces films à la fois en anglais et en français ? Si nous posons la question, c'est parce qu'il existe un film de 1983, Jaguar Force Thunderbolt, produit par IFD/Adda, et qui semble avoir été doublé en français directement à Hong Kong. Le résultat est absolument catastrophique : les doubleurs parlent français avec un fort accent étranger, semblent parfois lire leur texte en phonétique et la post-synchronisation est très aléatoire...

J'ai la double nationalité en fait. Mes premiers doublages étaient en français, des films produits par le gouvernement chinois et projetés dans les ambassades des pays francophones. Ils étaient tous doublés en anglais puis en français aux studios de Clearwater Bay, qui appartenaient au gouvernement chinois. Après, on m'a embauché pour faire les doublages en anglais et, par la suite, l'écriture des scripts de doublage en anglais (les films français n'ont pas duré longtemps). Je n'ai pas souvenir d'autres films doublés en français. Le film dont vous parlez a dû être doublé avant mon arrivée en 1986.

Généralement, et à la décharge des personnes concernées, le doublage à Hong Kong se faisait avec des budgets ridicules (moins de 1000 $ US). On n'avait pas le temps de peaufiner, il fallait être capable de doubler vite pour pas cher. Parfois on se retrouvait à 4 pour doubler une vingtaine de rôles, donc il fallait être capable de faire 4 ou 5 voix différentes chacun. Pour les films de guerre, quand deux armées s'affrontaient sur un champs de bataille, on devait repasser la bande plusieurs fois de suite pour superposer nos voix et donner l’impression d'une foule de soldats. Lorsqu'on doublait sur vidéo (et plus tard sur ordinateur), on se mettait devant le moniteur et on continuait sans s'arrêter jusqu’à ce que l’un d’entre nous n’ait plus de souffle ou bafouille son texte, et à ce rythme on arrivait à sortir 10 ou 20 épisodes de dessin animé japonais par jour. C’était vraiment du doublage à la mitraillette.

En fait les films étaient doublés en fonction du marché et à la demande du client. Par exemple, un film pouvait être doublé en anglais par nos soins pour un distributeur indonésien (les films en chinois était interdits dans ce pays à l'époque). Par contre, notre version anglaise ne serait pas la version distribuée aux Etats-Unis, qui serait certainement doublée par des acteurs américains sur place. De même, l'univers du doublage en France est très protégé, très syndiqué, tous les films étrangers qui sortent en salles sont doublés à Paris. Nous on était sur un marché bis, on doublait pour le marché de la vidéo, et pour l'export dans des pays comme les Philippines ou la Thaïlande.

Comme d'autres Occidentaux, vous êtes aussi apparu dans quelques productions IFD, et d'autres plus prestigieuses...

Oui, de mémoire j'ai fait de la figuration dans deux films de Godfrey Ho produits par IFD dont un où j'étais habillé en ninja et je me faisais trucider par un autre ninja. Pour les films de ninjas, Godfrey avait besoin d'Européens, juste pour filmer les yeux en gros plan et montrer que le méchant qui mourrait était bien un « gweilo » et pas un Chinois. Il me semble que j'avais également fait un film où je jouais un kidnappeur qui se faisait descendre après l'assaut des forces spéciales sur un immeuble, avec bagarre, cascades et tout le reste ! Les "forces spéciales" en question portaient tous des genres de rangers en tissu trois ou quatre pointures trop grandes et n'arrêtaient pas de se casser la figure !

Je me souviens aussi avoir fait de la figuration dans un film non-ninja que IFD tournait à Repulse Bay. On nous a donné des porte-cartes à épingler sur les revers de veste avec nos noms. J'ai donné mon prénom et le technicien chinois l'a marqué sur la carte en chinois. Après quelques minutes, des figurants cantonnais commençaient à me tourner autour et à me regarder. Puis, l'un deux est venu me demander mon autographe. Sentant qu'il y avait un truc, je suis allé trouver le tech et lui ai demandé ce qu'il avait mis sur ma carte. Il me répond "Dean Martin".

Je n'ai malheureusement aucune idée du nom de ces films, et je n'ai jamais pu les retrouver. Par contre, ma soeur Nina et ma copine de l'époque ont eu des rôles dans d'autres films IFD, "Rage of a Ninja" et "Diamond Ninja Force". C'était à l'époque d'IFD au Garley Building, sur Nathan Road. Sinon j'ai également travaillé sur des films de Jackie Chan, mais là on on sort du cadre de Nanarland !

Nina Pachy, la soeur de Martin, partage l'affiche avec Mike Abbott.

Nina Pachy dans "Rage of a Ninja" (1988), réalisé par Godfrey Ho.

Jackie Chan ? Vous pouvez nous en dire plus ?

Je n'avais pas vraiment de contact avec le monde du cinéma en dehors du studio de doublage, donc j'ai rarement eu l'occasion d'apparaître devant une caméra. Mais j'ai travaillé quelques nuits avec Jackie Chan aux studios de Cinema City (de nuit, parce qu'il était trop occupé le jour). A l'époque, il débutait sa carrière hollywoodienne et ne parlait pas très bien l'anglais. Je devais le coacher pour les scènes où il avait des dialogues en anglais (il me semble que c'était sur "Thunderbolt"...). C'est un type très simple et nature. A la pause, il prenait sa « rice box » avec les autres techniciens et ne jouait pas du tout la star. Un vrai gentleman. Sinon, j'ai tenu un petit rôle de figurant dans un autre film de Jackie Chan, "Project A part II" [NdlR : "Le marin des mers de Chine 2"]. J'apparais en arrière-plan "jouant" du violon.


Voici une capture d'écran du film, vous vous reconnaissez ?

Oui, je suis tout à droite. Le 2ème à gauche, c'est Geoff (Geoffrey) Brown, un Canadien. C'était en quelque sorte mon "colocataire" : on était dans le même dortoir au Chatham Hostel ! Il a tourné dans "Bloodsport", et dans quelques films pour Godfrey et autres, mais il est parti quelque temps après. Adam Frank (debout) est resté un peu plus longtemps et a fait de la figuration et des doublages avec moi avant de partir travailler avec les réfugiés vietnamiens. Il était de l'Arizona je crois.

Geoffrey Brown dans "Rage of a Ninja".

Et le type tout à gauche, vous ne le connaissiez pas par hasard ? On ne connaît pas son nom mais il a joué lui aussi dans des films de Godfrey Ho comme "The Ninja Squad" ou "Hitman le Cobra".

Non, désolé. Je me souviens juste qu'il faisait toujours le con et n'arrivait pas à "jouer" au tempo des autres... Autre bizarrerie : j'ai travaillé sur ce film les deux premiers jours mais j'ai dû m'absenter les deux jours suivants (j'avais décroché un boulot mieux payé !). Un copain australien avait pris ma place. Par contre, il ne portait pas de moustache, alors on lui a collé une grosse fausse moustache qu'ils avaient trouvé dans un coin. Je ne sais pas si ça se voit dans le film.

Quelle opinion avez-vous de Godfrey Ho ?

Godfrey voulait faire du fric, mais je pense qu'il avait également envie de faire plaisir à son public, même avec les moyens dérisoires mis à sa disposition. C'est un passionné du cinéma. Selon certains, il n'aurait pas été très réglo... mais le cinéma à HK à l'époque c'était un peu le Far West, alors il fallait s'y attendre. Pour vous donner une idée, il arrivait parfois que des acteurs hongkongais se fassent « kidnapper » sur les lieux de tournage par les triades parce qu'un studio concurrent avait besoin de leurs services ! Avec moi, Godfrey a toujours été super sympa et payait rubis sur ongle. Il avait (il a... il est toujours parmi nous) une joie de vivre et un optimisme à toute épreuve qui devenait communicatif. C'est quelqu'un pour qui j'ai beaucoup d'estime.

Godfrey Ho.

Pourquoi avez-vous finalement choisi de quitter Hong Kong ? Avec le recul, quels souvenirs gardez-vous de cette expérience là-bas ?

Hong Kong dans les années 80-90, c'était une époque où, en tant qu'Européen, on pouvait toujours trouver du travail. On se retrouvait à faire des boulots qu'on n'aurait jamais imaginé faire. Mes amis et moi n'étions pas de véritables « expats » dans le sens expatriés pour des raisons professionnelles. On s'est retrouvés à HK par hasard, on se débrouillait bien et la vie était belle, malgré ce sentiment un peu claustrophobe qu'on ressentait parfois dans cette petite enclave. La proximité des plages de Thaïlande et des Philippines faisait qu'on prenait souvent l'avion pour quelques jours de vacances.

Pourquoi est-ce que je suis parti ? D'abord, je voulais me rapprocher de mon fils qui habitait en France. Et puis j'avais aussi l'impression d'avoir « fait le tour » de Hong Kong, et j'avais du mal à supporter la pollution de la ville. Aujourd'hui, je suis traducteur français/anglais installé en Provence avec une clientèle française et étrangère. Je garde un excellent souvenir de ma vie à Hong Kong et des gens que j'ai rencontrés là-bas.

- Interview menée par John Nada -