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Frankenstein 80


Frankenstein 80

Titre original :Frankenstein '80 Mosaico

Titre(s) alternatif(s) :Les Orgies de Frankenstein, Les Orgies de Frankenstein 80, Frankenstein 2000

Réalisateur(s) :Mario Mancini

Année : 1972

Nationalité : Italie

Durée : 1h26

Genre : Chirurgie à la bolognaise

Acteurs principaux :Gordon Mitchell, John Richardson, Xiro Papas, Dalila Di Lazzaro, Bob Fiz, Renato Romano

Nikita
NOTE
2.5/ 5

Dans le cinéma d'épouvante, comme dans le reste du cinéma par ailleurs, signer un film original n'est pas chose aisée : certains trouvent la bonne idée au bon moment et l'exploitent avec suffisamment de talent, d'autres se contentent au contraire de reprendre servilement les idées à la mode en imaginant qu'il suffira de les accommoder avec les éléments les plus racoleurs et faisandés pour obtenir des produits vendeurs. Parfois, cela fonctionne ; dans bien des cas, on se retrouve avec entre les mains les exemples les moins recommandables de ce que l'on appelle le cinéma bis (ici, pris dans le mauvais sens du terme).


C'est incontestablement de cette dernière catégorie que relève « Frankenstein 80 », également connu chez nous sous le titre douteux « Les Orgies de Frankenstein », un distributeur facétieux ayant également combiné les deux titres pour nous servir en guise de mélange insane « Les Orgies de Frankenstein 80 ». Notons au passage qu'il n'y a rien de plus ringard pour un titre que de vouloir s'accoler un chiffre censé indiquer une année, méthode très sûre pour vieillir le film en le datant, comme l'indiquent les exemples de « Casanova 70 » ou « Don Juan 73 ». L'effet est d'autant plus négatif quand l'année est censée indiquer l'avenir, comme dans les cas de « 1990 : The Bronx Warriors » (« Les Guerriers du Bronx ») ou ce « Frankenstein 80 » sorti en 1972 et qui nous fixe la date de 1980 comme repère temporel futuriste.


Outre le choix moyennement inspiré de la datation du titre, ce film de Mario Mancini a pour intérêt de se situer dans un contexte de décadence des grands mythes du cinéma d'épouvante : suremployés à l'écran, ringardisés par un excès de productions de qualité douteuse, les Dracula, Frankenstein et autres loups-garous ne faisaient déjà plus peur à grand-monde, leurs dépouilles loqueteuses étant devenues la proie de tous les tâcherons de la planète. Faisant partie de ces piètres productions qui réduisaient alors à néant les mânes de Bela Lugosi et Boris Karloff, « Frankenstein 80 » porte la signature de Mario Mancini, chef-opérateur de films de qualité (on le retrouve au générique de « Il était une fois une petite culotte »), qui tourna là son seul film en tant que réalisateur. On comprend pourquoi en voyant cette production à peu près digne d'une mauvaise bande dessinée de gare, qui tente de dépoussiérer le mythe en le transposant dans un contexte moderne et lui adjoignant malhabilement un peu de fesse et une bonne dose de gore, ne parvenant au final qu'à faire sombrer dans une vulgarité de bien mauvais aloi le thème du savant fou créateur de monstres.






Le monstre (Xiro Papas).


Malgré des décors typiquement italiens, l'histoire de ce « Frankenstein 80 » est censée se dérouler en Allemagne. Le Dr Frankenstein – interprété par le toujours alerte et séduisant Gordon Mitchell – est un vil individu, médecin mis au ban de sa profession, qui, comme chacun s'y attendra, a créé à partir de morceaux de cadavres une sorte de brute épaisse qu'il affuble du nom de « Mosaïque » (la VF ne traduit pas le nom original de l'italien et l'appelle donc « Mosaico »). La science chirurgicale étant ce qu'elle est, le monstre est cependant régulièrement victime de réactions de rejet, ce qui oblige Frankenstein à se procurer des organes frais pour remplacer les derniers en date perdus par sa créature, par exemple en envoyant par avance Mosaico estourbir quelques innocentes victimes, histoire d'avoir du stock.


Gordon Mitchell.


C'est la foire à la tripaille.




La police est perplexe.


Les Allemands ont des goûts architecturaux légèrement transalpins.


De son côté, le savant fou entreprend de se procurer un remède révolutionnaire, mis au point par un de ses collègues, le Professeur Schwarz, et supposé empêcher les rejets de greffes. Ce sérum anti-lymphocytaire, qui « modifie radicalement le cadre morphologique des réactions de rejet », est encore au stade expérimental et n'existe malheureusement pour l'instant qu'en un seul exemplaire, qui est volé par Frankenstein : le vol empêche la greffe qui aurait pu sauver la sœur gravement malade d'un journaliste, lequel va dès lors mener l'enquête.


« L'unique flacon au monde du sérum Schwarz ! »


Le héros (John Richardson).




Il ne faut JAMAIS tourner le dos à Gordon Mitchell dans un film d'horreur.


De son côté, le monstre est essentiellement occupé à s'en prendre aux femmes du cru, et notamment aux prostituées : mais si le monstre est un obsédé sexuel, le réalisateur n'est pas tout à fait en reste, qui use de tous les stratagèmes possibles pour mettre plus ou moins à poil les victimes, dont certaines perdent leurs vêtements sans aucune justification particulière. Et quand le scénario perd du rythme, hop, on meuble avec une scène de striptease, ça ne mange pas de pain. Quand il n'y a vraiment plus rien à montrer, autant faire patienter le public avec un couple anonyme qui fait l'amour dans sa voiture, ça ne fait pas de mal non plus et ça permet de meubler une bonne minute la bande-son avec des gémissements porcins.


Fifille !








Dans cette scène où le monstre estourbit une bouchère à coups de tibia, nous apprenons essentiellement que les chemisiers italiens cèdent très facilement quand on frappe leur propriétaire sur la tête. A noter que le doublage français a des ratés, et que l'on entend l'actrice s'écrier "Aiuto !" ("Au secours", en italien).


Des agressions de femmes à poil.




Et maintenant, un entracte culturel avec un documentaire sur le strip-tease.


Rythmé par des scènes relativement sanglantes pour l'époque, mais plombé par une mise en scène moche et une photo laide, le film accumule toutes les scories d'un cinéma bis dangereusement racoleur et indigent. Une atmosphère gentiment malsaine et une complaisance quasi forcenée dans le glauque et le grand-guignolesque forcent la sympathie envers une œuvre assez représentative du fond du panier d'une série B italienne finalement plus péchue et sympa que bien des direct-to-video pachydermiques des décennies subséquentes. Ajoutons, pour les connaisseurs en médecine, quelques belles tirades de Gordon Mitchell durant l'opération du monstre : « Constant abaissement du taux glycémique, avec des valeurs au-dessous de zéro, 35 milligrammes pour cent, après trente-cinq minutes de détachement du foie. Stase pancréatique, mais aucune modification de l'amylasémie. L'hématocritique baisse rapidement. Le rapprochement des lignes de tracé montre un déficit de coagulation par probabilité d'hypopréthrombinémie. Signes d'intolérance sexuelle caractérisée. Signes de début de phénomène de rejet du foie. » Un bel étalage de n'importe quoi, qui signale une certaine volonté de faire semblant, tout en atteignant un bon niveau dans le registre « la science vue par les cancres ».






Du côté de l'interprétation, Gordon Mitchell se montre relativement sobre, conservant sa dignité malgré la douteuse coiffure dont on a cru bon de l'affubler ; on remarque également la présence, dans le rôle du journaliste, de John Richardson, essentiellement connu pour avoir joué les jeunes premiers dans « Le Masque du démon » de Mario Bava et les hommes préhistoriques dans « Un million d'années avant J.C. » : ce gommeux britannique, qui fit partie des postulants au rôle de James Bond avant de se faire coiffer au poteau par Sean Connery, échoua (dans tous les sens du terme) dans le cinéma bis italien et toucha le fond avec « La Bataille des Etoiles », qui le décida à prendre sa retraite. Nettement moins convaincant que Gordon Mitchell, Richardson se montre tout juste fonctionnel dans son rôle de héros médiocrement expressif, handicapé de surcroît par une photographie qui lui donne un visage luisant, voire moite, à croire qu'il porte en permanence trois couches de pullovers. Il suscite, en tout cas, nettement moins de sympathie que le monstre – incarné par Xiro Papas (alias Ciro Papa), silhouette récurrente du Z italien de l'époque – , une sorte d'idiot du village en permanence tourmenté par ses rejets d'organes et au final, plus ridicule et pitoyable qu'effrayant. Quant à Dalila Di Lazzaro (alias Dalila Parker) dans le rôle de la nièce de Frankenstein, hé bien elle est plutôt mignonne.


Gordon Mitchell a le printemps dans les cheveux.


John Richardson, le séducteur huileux.


Dalila Di Lazzaro montre ses atouts.


Grâce au baume Oil of Alouze, personne ne résiste à ma peau imprégnée d'huile d'olive.


Les rats de cinémathèque remarqueront une série de liens incestueux entre ce film et « Le Château de Frankenstein », sorti deux ans plus tard : outre la présence au générique de Gordon Mitchell et Xiro Papas, Mario Mancini y fut directeur de la photographie et l'interprète du Professeur Schwarz, Bob Fiz, y tint un rôle secondaire de paysan. A croire que tous ces braves gens avaient pour vocation d'apparaître dans toutes les mauvaises versions de Frankenstein tournées en Italie.


Non seulement les flics n'en font pas une, mais en plus ils ont un goût vestimentaire douteux.


Sans atteindre en permanence des niveaux de rigolade particulièrement élevés, « Frankenstein 80 » est un bon exemple de mauvais bis à l'italienne, correctement rythmé et suffisamment ringard pour retenir l'attention sans pour autant ennuyer. Un côté « cinéma de caniveau » très soutenu et allant jusqu'au bout de son statut de film d'exploitation rend le tout aussi intéressant à suivre qu'un roman-feuilleton débile mais distrayant, ou une mauvaise série noire remplaçant l'imagination par le gore poisseux et la fesse de film érotique à la noix. De quoi mériter d'être conservé dans une cinémathèque au rayon « musée des horreurs ».


Voilà, c'est fini. Bonne nuit les petits !

- Nikita -
Moyenne : 2.10 / 5
Nikita
NOTE
2.5/ 5
MrKlaus
NOTE
2/ 5
Rico
NOTE
2/ 5
John Nada
NOTE
2/ 5
Jack Tillman
NOTE
2/ 5

Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation
Le film a été réédité en DVD américain (Zone 1) chez les nanarophiles de « Cheezy Flicks ». On le trouve également sur des compilations comme "50 Night Screams", qui vous propose pas moins de 50 films d'horreur cheap en DVD. En France, c'est la chasse aux vieilles VHS d'époque, que ce soit sous le vrai titre « Frankenstein 80 » ou sous les jaquettes volantes qui portent le titre « Frankenstein 2000 », dont l'une tente de nous fourguer une tête de Boris Karloff tout à fait anachronique tandis que l'autre nous propose un alien sans aucun rapport avec la marchandise. A noter que les éditions VHS font un travail d'orfèvre, puisque le résumé (le même, écrit en mongolien, sur toutes les éditions) raconte toujours la fin du film.







Il ne faut pas confondre ce film avec d'autres oeuvres titrées selon le même esprit : "Frankenstein 70", avec Boris Karloff, "Frankenstein 90" avec Eddy Mitchell et Jean Rochefort, "The Vindicator - Frankenstein 2000" (une série B des années 1980 avec un cyborg vengeur) ou "Frankenstein 2000", alias "Return from death", de Joe D'Amato.


Le DVD américain.


Une compil' incluant le film.