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Les Expériences Erotiques de Frankenstein

(1ère publication de cette chronique : 2006)
Les Expériences Erotiques de Frankenstein

Titre original :La Maldicion de Frankenstein

Titre(s) alternatif(s) :La Malédiction de Frankenstein

Réalisateur(s) :Jesus Franco

Année : 1972

Nationalité : Espagne / France

Durée : 1h20

Genre : Mais vous êtes flou ?!?

Acteurs principaux :Howard Vernon, Lina Romay, Dennis Price, Alberto Dalbés, Anne Libert, Fernando Bilbao

Nikita
NOTE
2.5/ 5


Jesus Franco est une sorte d’auteur, on veut bien l’admettre. L’activité foisonnante du bonhomme lui a permis d’enquiller un nombre impressionnant de films aux très grandes disparités qualitatives, dont le côté « expérimental » est l’un des points les plus récurrents. L’expérimental, justement, ça passe ou ça casse et ici, il faut bien dire que ça casse. Lancé comme un train fou dans son expérience de révision des grands classiques de l’épouvante (il venait de tourner « La Fille de Dracula » et « Dracula prisonnier de Frankenstein »), le bon Jesus nous sort un brouillon de film ni fait ni à faire, tellement audacieux qu’il expérimente sans rien trouver, tel un scientifique du CNRS.


Filmé dans une belle frénésie auteurisante, « Les Expériences érotiques de Frankenstein » a pour particularité de nous présenter assez peu d’expériences, extrêmement peu érotiques, et quasiment pas de Frankenstein.


Frankenstein (Dennis Price).


Franco lui-même, dans le rôle du traditionnel assistant glauque.




Un laboratoire de haute technologie.


Le personnage du Docteur Frankenstein (interprété par l’ancien jeune premier Dennis Price, devenu has-been bouffi), occupé à ranimer sa nouvelle créature, est en effet assassiné au bout de trois minutes et demie de film par des mystérieux sbires, dont une sorte de femme-vampire aux mains griffues et couvertes de…de mousse ? Ha non, on me signale que les trucs verts sur ses mains, ce sont des plumes.


La femme-oiseau (Anne Libert, actrice de films érotiques soft de l’époque).


La donzelle est en effet une femme-oiseau, du nom de Melissa, qui se trouve être au service du vrai grand méchant du film, Cagliostro ! Le célèbre mage (Howard Vernon, qui domine l’interprétation de la tête et des épaules en cabotinant comme un perdu), qui règne sur une secte glauque dans son sombre manoir, s’est en effet piqué de créer une race d’êtres humains parfaits, qu’il pense obtenir en faisant s’accoupler la créature de Frankenstein avec une pure jeune fille. On ne voit pas bien ce qu’il pense tirer des ébats du monstre, qui arbore la sale gueule qu’on lui voit traîner depuis Boris Karloff, agrémentée d’une peau bizarrement argentée, mais j’imagine qu’il ne faut pas trop discuter avec les magiciens fous.






Howard Vernon n’en fait pas des tonnes.



Un monstre en papier alu.


Surviennent ensuite d’autres protagonistes : le Docteur Seward (le gentil), qui enquête sur la mort de Frankenstein, et la fille de Frankenstein, Vera, qui ressuscite brièvement son père pour obtenir l’identité de son assassin. S’ensuivent moult péripéties aussi sanglantes que confuses : Vera s’introduit chez Cagliostro mais est capturée, Frankenstein ressuscite sous forme de zombie, Cagliostro décapite des femmes, une jeune fille (Lina Romay, future Mme Franco, dans son premier rôle) fait d’obscures prédictions incompréhensibles, Melissa la femme-oiseau parle en regardant dans le vide. Les péripéties s’enchaînent dans un désordre parfait, filmées de manière hasardeuse par Franco qui semble avoir trouvé deux solutions pour masquer sa misère budgétaire : le flou artistique et le gros plan sur les visages des acteurs, ne filmant parfois que des moitiés de visages, des yeux, voire des épaules.


Ho, un flou !


Ho, un autre !


Beuaaaargh !




Anne Libert passe la moitié du film en gros plans.


Décidément, ce film est complètement flou !


Car ce qui domine avant tout dans « Les Expériences érotiques de Frankenstein », ce n’est ni l’horreur ni l’érotisme, c’est avant tout la confusion : angles de vue biscornus, clair-obscurs mal maîtrisés, plans ouverts et fermés au flou, l’intégralité du film baigne dans une sorte de délire brumeux sentant fort le remplissage, qui enquille les scènes les unes après les autres dans une logique minimale, arrivant tant bien que mal au bout de la durée prévue.


Encore un coup de Flou Manchu...






Les sbires de Cagliostro.


Pour ajouter à la bizarrerie générale, on ajoutera que le film semble avoir subi des coupes franches et des versions alternatives selon les pays : la copie française était apparemment bien plus déshabillée que la version espagnole, où les scènes avec Lina Romay semblent avoir eu pour fonction de compenser l’absence dans le métrage des quelques séquences olé-olé.


Cette grosse cochonne de Lina Romay, encore sage à l'époque.




Il serait injuste de ne pas citer l’attendrissant amateurisme des effets spéciaux, qui n’ont de spécial que leur quasi-absence : la scène où Cagliostro est censé tenir une tête coupée, les contrechamps nous montrant le visage de l’actrice filmée au ras du menton, n’est rien à côté de celle qui voit Frankenstein zombifié tenter d’étrangler le Docteur Seward pour être proprement décapité par un jet d’acide sulfurique effectué par le chef de la police. Stupéfiant.


Notez le petit défaut de l’éclairage.






Heureusement, l’acide sulfurique est toujours là en cas de besoin.


Coupé net ! Cet acide est vraiment puissant, le Docteur Seward a du pot de n’en avoir pas reçu une goutte.


Bizarroïde du début à la fin, « Les Expériences érotiques de Frankenstein » sont une belle occasion de voir Franco, aux prises avec ce qui était probablement un travail de commande, se prendre les pieds dans des tentatives d’expérimentation et faire n’importe quoi dans un parfait enthousiasme.




On regrettera seulement un certain manque de zooms, qui font pourtant partie intégrante du style Franquiste. Mais l’accumulation de délires est telle que le film fait oublier cette petite carence pour distiller une trouble séduction : malgré un rythme que l’on qualifiera poliment de nonchalant, l’étrangeté générale de l’œuvre, son mélange d’inventivité et de ringardise avec des trouvailles comme la femme-oiseau, finit par emporter l’adhésion des amateurs de curiosités rescapées de l’époque obscure où les salles de cinéma accueillaient véritablement n’importe quoi. Ajoutons une scène finale totalement incompréhensible que je renonce pour ma part à décoder tant que je n'aurais pas lu le scénario original (s'il a jamais été couché sur le papier !). Cinglé, fascinant, parfois écoeurant de confusion, voilà un film qui constitue, malgré certains passages inertes, un véritable choc pour les neurones et les rétines.

A noter que le film existe aussi en un format cinémascope assez différent de la version VHS que nous avons pu visionner, et qui semble avoir subi un recadrage sauvage. L'esthétique du film est, paraît-il, nettement plus soignée dans sa version cinéma. M'enfin, cela nous semblerait incroyable que le film en soit moins fumeux... (merci au forumer Skull pour cette information).

- Nikita -
Moyenne : 2.25 / 5
Nikita
NOTE
2.5/ 5
MrKlaus
NOTE
BF/ 5
Jack Tillman
NOTE
2/ 5

Cote de rareté - 1/ Courant

Barème de notation

Artus Films a sorti un beau combo Blu-Ray/DVD des Expériences érotiques de Frankenstein en copie restaurée au format cinémascope d'origine, avec la version française et la version alternative espagnole (cette dernière uniquement sur le Blu-Ray), une présentation du film et une présentation du producteur Robert de Nesle par Alain Petit, un diaporama d'affiches et de photos, et les bandes-annonces de la collection Jess Franco.