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Les Aventuriers de l'univers perdu

(1ère publication de cette chronique : 2011)
Les Aventuriers de l'univers perdu

Titre original :Prisoners of the Lost Universe

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Terry Marcel

Année : 1983

Nationalité : Grande Bretagne

Durée : 1h30

Genre : Salade mixte

Acteurs principaux :John Saxon, Richard Hatch, Kay Lenz, Kenneth Hendel

La Créature du Lac Gris
NOTE
3/ 5


Paris. An 2109. Musée Nanarland.
Comme tous les jeudis – rendu férié hebdomadaire en 2100 – je me rendais au Musée Nanarland, un lieu à l’univers chamarré qui propose toutes les semaines un visionnage commenté d’une œuvre étrange, pan d’une catégorie de cinéma qu’une poignée de cinéphiles aux goûts particulièrement excentriques s’était employée à déterrer contre vents et marées. Pourquoi ? C’est ce que le musée ouvert tout récemment cherche à nous expliquer, figeant pour l’éternité des centaines d’objets hétéroclites et insolites, tels des VHS originales, des affiches aux titres bizarres, des portraits d’acteurs n’ayant percé que dans de minuscules sous-genres...
Après avoir traversé le hall Godfrey Ho, je me retrouvais à nouveau dans la salle Bruce Baron pour la projection hebdomadaire. Une petite vingtaine de personnes étaient déjà là, assises sur des macaliens pliants, en face d’un écran blanc grand format. Oui car ici, on n’emploie pas les techniques modernes mais un vieux format qui porte le nom kitsch de BR, pour Betamax-Ray. Juste à temps ! Sylvia 6, l’androïde chargée de l’accueil et des commentaires prenait déjà la parole.


« Bonjour à tous, chers fidèles, dans cette nouvelle Séance Excentrique. Le film que nous allons vous projeter maintenant se nomme "Les Aventuriers de l’Univers Perdu". »
« Ah oui, je le connais !! C’est ce film, là, avec cet homme au chapeau et au fouet... » dit un gros homme à côté de moi.
« Non, non. Vous, vous parlez des "Aventuriers de l’Arche Perdue", c’est différent. Il s’agit effectivement d’un film d’aventures, mais pas de cet acabit. Trêves de digressions, place à la projection ! »
Le noir. Les premières images défilent. Une jeune femme blonde du nom de Carrie (Kay Lenz), présentatrice télé de son état, se trouve chargée d’une nouvelle interview. Après un accrochage avec un jeune électricien nanti d’une épouvantable chemise à carreaux, du nom de Dan (Richard Hatch), elle arrive au domicile du futur interviewé, un savant portant le nom du Docteur Hartmann (Kenneth Hendel).


« Ah mais je le connais lui ! Je l’ai vu dans un film la semaine dernière... "Bienvenue chez les Ch’tits", je crois... »
« Non Monsieur, vous confondez avec Kad Merad. » me répliqua Sylvia 6 sans se démonter.
Après une brève parlote dans un laboratoire ultramoderne (deux ou trois machines peintes en rouge et équipées de diodes clignotantes, plus une table basse reconvertie en télétransporteur, ça suffisait pour avoir l'air ultramoderne dans les années 1980), le Dr Hartmann se fait mystérieusement effacé par un rayon jaunâtre. Panique de la demoiselle qui perd du même coup son interview. Mais voilà que resurgit soudain l'électricien à chemise – pourquoi est-il rentré dans cette maison précise ? – d’une manière tout à fait décontractée... ce qui ne l'empêche pas de se faire assommer par Carrie. Je me suis d’ailleurs demandé un instant pourquoi elle avait le réflexe de taper un inconnu dans une maison qui n’était pas la sienne, cela pouvait aussi bien être un membre de la famille. Quoiqu'il en soit, nos deux lurons sympathisent dans le salon, jusqu'à ce que le brave Dan se fasse effacer à son tour au cours d'une fausse manœuvre. Ne voulant apparemment pas rester seule, la journaliste décide de le suivre...




« Euh, excusez-moi, mais j’ai du mal à comprendre sa logique... Pourquoi est ce qu’elle le suit ? Ça semble dangereux, elle ne le connaît même pas et elle aurait pu aller chercher de l’aide ailleurs... »
« Ça, monsieur, le réalisateur ne l’a pas précisé, sans doute cela faisait-il partie du caractère de son personnage. »
Je n’étais pas particulièrement convaincu par les explications de Sylvia 6 mais je m’étais habitué à me livrer à ce genre si particulier de cinéma. Apparemment, les trois personnages sont arrivés sur une planète du nom de Vonya, peuplée de créatures étranges. Coup de bol extraordinaire, le Vanyan ressemble exactement au Français, ce qui leur permet de communiquer avec la faune locale, à savoir des humanoïdes verts, des voleurs, un homme velu - qui me rappelait furieusement le Grand Chambelier Rugby Man Sébastien Chabal - et de drôles de petites créatures aux yeux barbouillés à la surimpression rouge et bruités par des feulements de cougar. Soudain, une séquence épatante : deux de ces êtres se retrouvent poussés dans un ravin. Impressionnante chute de deux corps.



Étude sur la chute des corps.


« Mais... ils se sont vraiment sacrifiés pour faire cette scène ? Quelle abnégation. »
« Pas du tout, monsieur, c’est là la magie du cinéma de cette époque. Ce sont des MA-NNE-QUINS ! »
Rumeurs d’admiration dans la salle.
Au cours d’une autre séquence, je ne peux m’empêcher d'être interloqué par l’attitude de la godiche blonde. Voilà qu’elle se baigne à poil dans un lac qui se trouve dans une dimension inconnue et peuplée de créatures inconnues, sans penser ne serait-ce qu’une seconde que ça pourrait être dangereux. Elle manque d'ailleurs de se faire zigouiller au passage par un figurant nanti d’un beau masque de monstre en latex, trouvable dans toutes les bons musées de farces et attrapes pré-historiques.


Le terrifiant démon des eaux.


Le film progresse et nos héros prennent contact avec plusieurs ethnies. Des tribus semi-primitives au visage ruisselant de caoutchouc, se cachant dans des grottes où un clan idolâtre un monolithe qui fait disparaître les gens dans une gerbe d’étincelles... Tout ceci semble indiquer que le lobe créatif du réalisateur souffrait d'un surplus d’idées dont il n'a su lesquelles privilégier, pour finalement toutes les employer au petit bonheur la chance. Mais quand soudain, au milieu de tout ce foutoir, apparaît une tête familière, je ne pus réprimer un cri de surprise :
« Ah ! Lui, je le connais ! John So..Sax..quelque chose. Il a tourné avec Bruce Le, n’est-ce pas ? »

Tagada, tagada voilà John Saxon.


« Là encore, vous vous trompez, à moitié il est vrai. Il s’agit bien de John Saxon mais il n’a pas tourné avec Bruce Le, il n’était pas encore assez connu. Par contre, il a côtoyé l’un de ses clones, un dénommé Bruce Lee dans "Opération Dragon". » m'expliqua avec nonchalance Sylvia 6. « Il joue ici le rôle de Kleel, rebaptisé en français Gotan. »


Une affiche allemande.


Moment très particulier que celui où l’intérieur de la forteresse dudit Gotan nous est dévoilé. De l’extérieur, on a une palissade en bois assez minable avec quelques petites huttes de l’autre côté. Puis une sorte de grand bâtiment à la perspective douteuse servant de donjon. On s’aperçoit alors que ce fameux chef de guerre qu’est Gotan dispose d’hommes de main aux trognes patibulaires et au jeu tout en finesse, de femmes esclaves sexuelles et surtout, surtout, d’une arme ultime, contre laquelle on ne peut rien et grâce à laquelle il peut asseoir sa domination sur cet univers ingrat et apparemment très peu peuplé. Cette arme, c’est... un pistolet. Mais un pistolet à l’apparence très vieille, même pour l'époque, tenant plus du type Jack Sparrow 150 que du Python 357. S'ensuivent les retrouvailles avec le professeur qu’on avait alors complètement oublié et qui bosse à présent pour Gotan. On ne nous expliquera jamais ni comment ni pourquoi il est là. Jamais.


Interlude "violence insoutenable".


Quant à John Saxon, apparemment il n’a qu’une envie très limitée d’être là à jouer les tyrans d’un monde rétro-futuriste, et son jeu s’en ressent. Qu’il balance des injures bien senties à ses sbires ou qu’il drague avec toute la classe de la brute épaisse (« Tiens, prends ce cadeau. Je l’ai récupéré sur le cadavre d’un voleur que j’ai refroidi ! »), il détonne quand même parmi les quidams employés pour jouer sa suite. Professionnel. Comprendre impatient de toucher son chèque. Tout le reste du film sera consacré à la libération de Carrie la gourdasse des griffes du grand méchant Gotan. Dan, tombé follement amoureux de celle-ci, déploie des trésors d’astuces (à base de combines de troc dépassé ou de bricolages totalement surréalistes) et de force, tatannant des dizaines et des dizaines de figurants au cours de baston rythmées à la boîte à baffe. En fait, c’est lui qui fait tout le film et je me demandais sérieusement à quoi servait les autres : l’homme-vert, le Legolas du pauvre qui connaît tous les secrets de la terre vonyenne ; Malachi (prononcez Malakaï), un voleur habile mais pleutre, passant les trois-quarts de l'histoire les bras croisés ; et l’homme des cavernes que la journaliste a tiré de sables pas trop mouvants vers le début du film. Bon, certes ils balancent deux ou trois taloches de temps en temps, mais pas de quoi crier venez voir.

 
L'habile voleur, l'homme-vert et le "beastman" (ça c'est du nom !).


Mais surtout, une autre interrogation titillait mon cortex. La fin approchait, comment tout cela allait-il pouvoir finir ? Il restait pas mal de questions en suspens, de fils à dénouer, d’intrigues à expliquer et très peu de temps au compteur. Mais pendant que je ruminais tout ceci, je tiquai une fois de plus. Les personnages venaient de passer deux fois de suite dans un couloir aux murs en carton pâte imitation brique qui ressemblait comme deux gouttes d’eau à celui dans lequel ils venaient de passer.
« Dites, c’est étrange, mais ils ne tournent pas un peu en rond ? »
« Pas du tout » répondit Sylvia 6. « En fait, il s’agit d’une technique très astucieuse pour limiter les décors. On tourne plusieurs plans dans un même décor que l’on change subrepticement entre deux pauses et le tour est joué ! »


Le couloir mystérieux de Gotan !


Le fait est. Le petit problème, c’est que du coup, la géographie du lieu relève du casse-tête. Ils passent par une porte et se retrouvent dans le même couloir de l’autre côté avant de repasser par cette même porte une deuxième fois ! Une fois que le concept est accepté par l’œil humain, le rendu de cette courte scène agaçait encore mes zygomatiques de manière incontrôlée. Ouf, voilà la donzelle sauvée par la fine équipe et le décor de Gotan se retrouve pulvérisé par plusieurs explosions. Explosions pas très explicables parce que la matière combustible n’est pas censée être en abondance sur Vonya, or voilà que ça pète comme à Saïgon. Les héros se rassemblent dehors et soudain... la fin. Je n’étais pas très sûr de ce que je venais de voir à l’instant. Etait-ce vraiment fini, là, comme ça ? J’en restais médusé, tellement pris de court par cette fin aussi abrupte qu'une falaise néo-bretonne que je ne réalisais pas que les premiers noms défilaient sur l’écran noir.
« Mais... mais... ça finit comme ça ? Vous êtes sûre qu’une partie du film n’est pas manquante ? »
« Non, non, c’est bien ainsi que cela finit, vous avez la vraie fin et le film complet. »






Les Aventuriers du Texas Perdu ! [NDLR : en l'occurrence l'Afrique du Sud]


Quand la lumière revint, j’essayais de faire un point sur la chose que je venais de voir. Un électricien avec autant de charisme qu’un pavé, une demoiselle en détresse désespérément cruche, des acteurs du fond de seconde zone, des maquillages aussi réussis qu’un Halloween de maternelle, une dimension « futuriste » parsemée d’arbres à assiettes en cartons, de rochers qui brûlent, de peuplades aussi éparses que bizarroïdes et nanties de costumes fleurant bon les antiques Puces de Saint-Ouen (quand ils ne laissent pas entr’apercevoir des jeans sous des haillons), des décors pas franchement convaincants, et je passe sur les chutes d’acteurs vraisemblablement involontaires. Le petit speech de fin de Sylvia 6 m’apprit que si le film bénéficia en son temps d’une sortie cinéma, ces "Aventuriers de l’Univers Perdu" débutèrent leur périple... à la télévision ! Ce qui explique le manque visible de moyens. Encore tout émoustillé par ce film et alors que les gens se levaient de leur siège pour sortir, Sylvia 6 nous annonça que le prochain jeudi, un cycle ninja se déroulerait dans la salle Filmark. Une chose est sûre, me dis-je en emboîtant le pas de mon voisin vers la sortie, moi, je viendrai !

 


Encore une victoire de la culture !

Une affiche espagnole un peu mensongère.

Petite devinette pour la route : quel est le détail qui tue dans ce plan ?

- La Créature du Lac Gris -
Moyenne : 2.40 / 5
La Créature du Lac Gris
NOTE
3/ 5
Rico
NOTE
2.5/ 5
Kobal
NOTE
2/ 5
Jack Tillman
NOTE
2.5/ 5
Wallflowers
NOTE
2/ 5

Cote de rareté - 2/ Trouvable

Barème de notation

Il est bon de savoir que le film se trouve parfois sur les services de streaming en assez bonne qualité. Nous l'avons vu sur Netflix dernièrement, mais en VOST, pas en Français.

Il existe aussi quelques éditions blu ray, notamment une édition espagnole :

Le film est sorti en DVD et même plus récemment en Blu Ray chez "Synergy Ent" aux USA, dans plusieurs éditions, dont une en coffret avec un autre film fort sympathique : "Star Odyssey", du grand Alfonso Brescia. Fin 2018 une version Blu-ray américaine avec la V.F. est même sorti en multizone chez "Odeon".


Une galette ricaine.


Pour ce qui est de la France, il faut encore s’employer à trouver les VHS de chez "Sunset" et "Scherzo" pour pouvoir profiter des aventures extraordinaires de Dan et Carrie.




Un DVD allemand.