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Yor le Chasseur du Futur

(1ère publication de cette chronique : 2002)
Yor le Chasseur du Futur

Titre original :Il mondo di Yor

Titre(s) alternatif(s) :Yor the Hunter from the future

Réalisateur(s) :Antonio Margheriti, sous le pseudo d'Anthony M. Dawson

Année : 1982

Nationalité : Italie / Turquie

Durée : 1h22

Genre : Big Jim emperruqué

Acteurs principaux :Reb Brown, John Steiner, Corinne Clery, Carole André, Luciano Pigozzi, Ayshe Gul, Aytekin Akkaya

TantePony
NOTE
3/ 5


Affiche dessinée par le grand Philippe Druillet, ici en petite forme.


« Yor le chasseur du futur » raconte, en deux mots, l'histoire d'un guerrier de la préhistoire qui, à la recherche de son passé, découvrira qu'il vient d'une autre planète . Rahan découvre qu'il ne fait qu'un avec Luke Skywalker ! Ce postulat hautement farfelu, tirée d'une bande dessinée italienne, « Yor il cacciatore », de Juan Zanotto, qui remporta un vrai succès dans les années 1970, aurait pu donner un film réussi si les moyens mis en œuvre avaient été à la hauteur du challenge. Hélas, on ne peut pas dire qu'Anthony M. Dawson, alias Antonio Margheriti, ait vraiment réussi son pari. Habituellement plus inspiré, ce vétéran du cinéma italien, qui signe scénario, réalisation et effets spéciaux, s'embourbe quelque peu dans ce qu'il désignera lui-même comme une grosse bande dessinée bon enfant.


Plus qu'un héros : une icône : Reb Brown !


Cette co-production italo-turque, tournée en 1982 alors que le cinéma de genre européen était en plein déclin, tente de créer un univers original pour résister à la déferlante « Star Wars » mais se heurte à un manque de moyens rendant son défi totalement impossible : les effets spéciaux sont rudimentaires au point de sembler venir tout droit des années 1950 et le côté « toc » de l'entreprise rejaillit même sur les jolis décors naturels de Cappadoce, qui en arrivent à ressembler à un terrain vague tant ils sont mal exploités.

 
Ce que "L'Odyssée de l'espèce" nous avait caché : les instituts de beauté et l'après-shampoing existaient bien dans la préhistoire.


D'entrée, le film nous met dans l'ambiance avec sa merveilleuse chanson « Yooooor's world ! / He's the man ! / Yooooooor ! » (composée par Guido et Maurizio De Angelis : rendons à César que ce qui est à Nanar), accompagnant les bonds de cabri du niaiseux Reb Brown qui parcourt les montagnes rocheuses, sa hache de pierre à la main. Rasage impeccable et brushing parfait, Yor est un héros bon aryen à peu près aussi crédible en pleine préhistoire que John Wayne en guerrier tatar (le fait que ce dernier choix de casting a vraiment été fait nous aide à relativiser la notion de logique au cinéma). Notre héros lutte dès les cinq premières minutes contre un dinosaure en polystyrène dont le niveau de crédibilité va au-delà de nos plus folles espérances : outre un maquillage ridicule que n'aurait pas renié un élève de CM2 en cours d' EMT, nous vous conseillons fortement de regarder attentivement la scène où le dinosaure se "rue" à 3 Km/h sur Yor ; profitez-en pour admirer les mouvements très réalistes du monstre, apparemment monté sur rails. On peut nettement distinguer sous la "peau" du dinosaure le mécanisme primitif servant à le mouvoir.

Parle à ma main.


Le trio de héros, composé du preux Yor, d'une belle sauvageonne interprétée par Corinne Cléry et d'un vieux sage joué par Alan Collins, alias Luciano Pigozzi, l'homme qui figure dans tous les bis italiens, vit ensuite des aventures rocambolesques dont le côté feuilletonesque sombre en quasi-permanence dans le nanar. On combat de redoutables tricératops en plastique à mains nues, on fait du deltaplane avec un ptérodactyle mort, on affronte des hommes de Néandertal. Toute cohérence temporelle est oubliée, de même que les milliards d'années ayant séparé les hommes des dinosaures (anachronisme récurrent au cinéma). Passons également sur la physionomie des dinosaures, qui mélangent plusieurs espèces en défiant toutes les connaissances paléontologiques à ce jour. De toutes manières, ce n'est pas grave, puisque l'on apprend au milieu du film que le héros est un extraterrestre, comme le premier Thorgal venu.


Corinne Clery, ex héroïne pas farouche d'"Histoire d'O", ex James Bond Girl de "Moonraker" dont la carrière, il faut l'avouer, s'est un peu embourbée en Italie.


Tiens, sale bête !


La seconde moitié du film fait en effet passer « Yor » du niveau de film bis en toc à celui de nanar stratosphérique. Après avoir rencontré les androïdes du méchant dictateur Overlord et découvert le secret de ses origines, Yor affronte les méchants en réussissant, tout guerrier de Cro-Magnon qu'il est, à manipuler les ordinateurs et lasers hautement perfectionnés du vaisseau spatial. L'utilisation d'ordinateurs « futuristes » par un film datant de 1982 est un autre facteur de comique, bien involontaire mais assez irrésistible.


Un futur très en retard...


Il serait injuste ne pas citer la scène hautement ridicule où le vieux Alan Collins, qui ne servait pas à grand-chose depuis le début du film, se balance sur un câble pour rattraper Yor au vol comme un trapéziste. Le mannequin en mousse et la coupure du montage valent véritablement le détour.


Oui. Ce sont des jouets.


Enfin une mention spéciale aux costumes, qui se résument pour les guerriers à d'énormes moon-boots en fourrures pour ces messieurs ainsi qu'à de beaux bikinis en moumoute pelucheuse pour les filles.


Affiche promotionnelle.


Tout en restant un film mis en scène de manière assez professionnelle, « Yor le chasseur du futur » est un nanar de très bonne cuvée, surprenant à chaque scène par ses incohérences, ses scènes en contre-jour, son Reb Brown bi-expression (sourire / pas sourire) et son final à la débilité achevée, se déroulant dans une base spatiale en carton, avec des soldats en caoutchouc au look de sous-Dark Vador et John Steiner, cabotinant sans retenue en tenue de sous-Empereur Palpatine (bien que ses allures de traître de mélodrame fassent également penser à Ming dans « Flash Gordon »).


Si George Lucas a vu cette photo, Antonio Margheritipouvait s'estimer heureux d'avoir échappé au procès.

 
Les stormtroopers en caoutchouc.


Reb Brown joue la carte de la promotion à fond.


N'oublions pas non plus les gueules impayables des méchants troglodytes (peau bleue, dents pourries et chevelure hirsute... des gueules de vilains quoi !) et de Loa, la princesse des cavernes, fille cachée d'Henri Emmanuelli et grande gagnante du prix "Miss Sourcils 1982". La France est d'ailleurs bien représentée, puisqu'outre l'héroïne interprétée par Corinne Cléry, c'est une autre actrice française expatriée en Italie, Carole André, qui joue le rôle de Loa. Cocorico !

Reb Brown (enfin sa doublure) débaroulant avec un Ptérodactyle comme deltaplane.


Les nanardeurs les plus attentifs (mais alors vraiment super attentifs parce qu'il est très maquillé) pourront reconnaître Aytekin Akkaya, le copain de Cüneyt Arkin dans le Turkish Star Wars !


Traces en bronzage (en forme de slibard !) sur les fesses de certains figurants, stalactites en plastique, dialogues pompeux ("Derrière ces collines maudites se cache un terrible secret gravé dans le feu de la douleur des hommes" – quel vocabulaire pour des hommes des cavernes qui mangent avec les doigts dans leurs écuelles comme les derniers des crados), interprétation de série C (la jeune fille du village joue de manière si empotée qu'elle semble parfois lire son dialogue sur un panneau), « Yor le chasseur du futur » est une crétinerie de très bonne tenue, suffisamment rythmée et colorée pour satisfaire les amateurs de kitscheries décomplexées.


Un album de la BD d'origine.


A savoir qu'en espagnol le héros s'appelle Hanga.


Prévu à l'origine pour être une série télévisée en quatre épisodes (la version longue ne fut au final guère exploitée par la télé italienne, qui ne daigna la diffuser que tard dans la nuit : on rêve de la découvrir !), « Yor le chasseur du futur » fut en son temps, mine de rien, un joli succès au box-office international. Cela laisse évidemment rêveur, mais on s'en réjouit tout de même pour cette série B dont le ridicule n'enlève rien au côté profondément sympathique.

Bouh !

- TantePony -

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Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation

Pendant longtemps c'est d'Allemagne que nous venait le seul DVD connu du film. Sous le titre « Einer gegen das imperium » chez "Best Buy Movies". Hélas, il n'y a là qu'une version allemande sans bonus. Pour savourer Reb Brown en français, il reste heureusement aux collectionneurs puristes les deux versions VHS de chez "Sunset Video" ou "Prism / Initial". 


Depuis 2017, une édition blu-ray 35ème anniversaire est sortie chez les Américains de "Mills Creeks" ! Si, comme souvent chez eux, le master est juste honnête ils se sont cependant fendus d'un commentaire audio de Reb Brown himself ! Hélas tout cela est en anglais exclusivement.
A noter pour les complétistes un double DVD polonais qui regroupe "Yor le chasseur du Futur" et "L'épée du vaillant".

Un petit éditeur indépendant "Edition Films Classique"  propose sur internet un DVD-R avec une version française de qualité honnête d'après l'ami Jack Tillman.

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