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The Ultimate Ninja

(1ère publication de cette chronique : 2013)
The Ultimate Ninja

Titre original : The Ultimate Ninja

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Godfrey Ho

Année : 1986

Nationalité : Hong-Kong

Durée : 1H25

Genre : BB VS SS

Acteurs principaux :Bruce Baron, Stuart Smith, Sorapong Chatree, Pedro Ernyes (alias Pedro Massobrio)

Kobal
NOTE
1/ 5


C'est toujours une tristesse que de constater qu'on ne célèbre jamais autant qu'on le souhaite l'amour que l'on porte aux siens, un fait que la Mort se charge de nous rappeler sans ménagement. Je me serais donc bien passé du récent décès de Bruce Baron pour jeter un coup d’œil à ce ninja-flick, symbole d'un genre qui a participé à la consécration d'un moustachu comme Nanarland les affectionne. Surtout que pour le coup, il ne faut pas se mentir, "The Ultimate Ninja" est loin d'être The Ultimate Ninja Movie. Au contraire, voici un exemple de 2/1 des plus fainéants qui soient : Godfrey Ho s'est ici contenté d'une seule et brève séquence de champs-contrechamps, particulièrement peu inspirée qui plus est, pour tenter de lier le métrage thaïlandais d'origine à ses fantasques rajouts de gweilos. Résultat, les tribulations de nos ninjas n'ont strictement aucun rapport avec l'histoire principale du film.

 


Évacuons donc rapidement la partie thaïlandaise du film, d'autant qu'elle ne présente pas vraiment d'éléments nanars. Pour une fois, l'histoire est assez simple à suivre, ce qui s'explique par la présence quasiment intégrale des scènes originales dans le bon ordre chronologique. On évite donc les distorsions de montage ronge-neurones dont Gégé Ho a souvent tendance à abuser.
Le scénar' de "The Ultimate Ninja" se consacre aux conséquences d'une sombre histoire de chefferie de village qui a mal tourné, entraînant un légitime désir de vengeance de la part des descendants du précédent dirigeant assassiné. Soraprong Chatree, ze movie star thaï (vu dans moult 2/1 de IFD et Filmark, et qui ne doit pas savoir que sa filmographie fait le double des films pour lesquels il a été payé) se fait désirer pendant 1 heure, laissant le champs libre aux loubards locaux qui s'avèrent en plus grand nombre que les pouilleux du village racketté (et pour cause : le village est constitué d'une seule paillote). On se demande bien comme ils parviennent à faire fortune, d'autant qu'ils passent leur temps à tabasser les malheureux commerçants qui n'ont jamais un rond.

 


Et donc on nous promet du ninja ultime, avec des shurikens, et tout, et tout...

...et on nous refile une bande de pleupleus en jean slim.


Ajoutez à ce passionnant récit les tourments d'un maître de kung-fu, embauché par nos mafieux ruraux pour leur apprendre les rudiments des arts martiaux (sans grand succès cela dit, le premier étranger venu leur mettant systématiquement la misère sans trop de problème), et qui se retrouve ainsi coincé entre ses valeurs morales et la nécessité de faire bouillir la marmite. C'est vrai qu'on ne s'attarde pas assez souvent sur ces vieux maîtres qui enseignent des techniques mortelles à n'importe qui, sous couvert d'une vague philosophie philanthropique hypocrite (essayez de le dire vite), et qui finissent par venir se plaindre que leurs élèves ont mal tourné. Et l'éthique, bordel ! Bien loin de ces préoccupations intellectuelles, les personnages saisissent donc la moindre occasion pour se castagner à tour de rôle. Comprenez que pour nous vendre sa camelote, Godfrey est cette fois allé piocher dans un film de tatane thaï, ce qui nous change un peu des sempiternels actioners martiaux et autres polars chinois mous du slip.

 


Heureusement, on a tout de même quelques bonnes têtes de vainqueurs...

...du cabotinage (je cherche d'ailleurs le nom de cet acteur, souvent vu dans les films thaï pompés par IFD, comme "Ninja Invasion" et "Spécial Commando")...

...et un sens du cadrage qui ne trompe pas sur la marchandise.


Enfin, nul n'est dupe, ce n'est pas pour regarder des Thaïlandais se foutre sur le tronche dans leur coin de Tiers-monde que le spectateur occidental gavé de chips regarde un film intitulé "The Ultimate Ninja". Non, ce qui nous intéresse, c'est bien évidemment ce casting qui nous fait miroiter un face à face de rêve : Bruce Baron contre Stuart Smith ! Mais qu'est-ce qui peut bien amener ces deux hommes à s'affronter ? Une infamie, et pas des moindres. En effet, Stuart Smith (alias Victor) est le leader du gang des Black Ninjas. Tout à son avidité malfaisante, il s'en prend au chef des Red Ninjas, profitant lâchement de l'absence du seul élève de ce dernier, Bruce Baron (alias Charles), parti faire son traditionnel jogging dans les bois. Stuart laisse son adversaire pour mort après lui avoir volé la statuette du Black Ninja Warrior. Revenu au bercail, Bruce ne peut que recueillir les dernières paroles de son maître ("be a good ninja, Charles") qui fait par la même de lui son successeur, et lui confie le devoir de récupérer la relique sacrée afin de l'unir à nouveau au Golden Ninja Warrior, toujours en sa possession, et ainsi obtenir le "Supreme Ninja Power". La routine de comme d'hab', quoi.

 


Bruce et sa serviette jaune porte-bonheur (la même que dans "Challenge the Ninja").

Il se dégage de cette image une atmosphère un peu "Brokeback Mountain of the Ninjas", non ?

Le magnifique Black Ninja Warrior. Notez son joli mascara.

Et le Golden Ninja Warrior, qu'on ne présente plus puisqu'il est au coeur de l'intrigue de nombre de ninja-flicks.


Bruce et Stuart restent donc chacun dans leur coin (les bois pour Bruce, une carrière de pierres pour Stuart), à conspirer et à s’entraîner durant des plombes en vue de l'affrontement final. Tout au plus Bruce exécute-t-il sommairement quelques figurants ninjas adverses qui lui tombent entre les pattes, histoire de fournir au spectateur 30 secondes de mecs en pyjama tous les quarts d'heure. Là encore, on ne peut pas dire que Godfrey se soit foulé, le félon se contentant vraiment du minimum syndical. Mais bon, comment lui en vouloir quand on est fan de cette esthétique unique de la mythologie du ninja 2/1, devenue tellement archétypale qu'on dirait un théâtre de marionnettes mythologiques, recasant à l'infini les mêmes traceurs symboliques, la même grammaire cinématographique et, oserais-je le dire, cette signature inimitable d'un courant artistique à part entière ? Comment ne pas craquer devant ces longs jeux de regards obscurcis par des cagoules colorées, ces zooms maladroits, ces flips aussi généreux qu'inutiles, ces bandanas uniques et si naïfs, ces statuettes fascinantes probablement achetées sur l'étal d'un vendeur à la sauvette, ces figurants aux gueules aussi improbables que les parcours de vie qui les ont entraînés dans cette galère, ces musiques sauvagement volées à leurs auteurs, ces dialogues sans épaisseur qui ressassent sans fin les mêmes thèmes, ces tables à pique-nique qui, à force de servir de décor d'un film de ninja à un autre, ont fini par accéder à la consécration cinématographique, et bien entendu ce délicieux cabotinage si cher aux amoureux de ce site...

 



De fantastiques gweilos comme on n'en verra sans doute plus jamais (les gweilophiles reconnaîtront en bas à gauche Pedro Massobrio, crédité Pedro Ernyes chez IFD et Pedro Hughes chez Filmark, et iront le retrouver dans "Challenge The Ninja", "Ninja Invasion" ou "L'Empire des Ninjas").

Des bandeaux ninja avec des tête de mort dessus pour bien repérer qui sont les méchants (et l'assument pleinement).

Des tables de pique-nique qui ont vu passer plus de ninjas que de familles en week-end.

Bruce Baron qui s'amuse à faire de la télékinésie avec son Golden Ninja Warrior...

...pendant que Stuart Smith tente de regarder ses doigts.


Et alors qu'on désespérait de le voir enfin se réaliser, voici l'affrontement de nos deux monstres sacrés du cinéma nanar, sans réelles fioritures certes (pas d'arme loufoque, de transformation en branche ni même de bombinette à fumée, snif), mais après tout, plus que la lutte pour des reliques en plastoc made in Taïwan, le véritable duel de ce film n'était-il pas plutôt l'obtention du pouvoir de suprême acteur ? Car il y a là deux écoles que tout oppose. D'un côté, un Bruce Baron qui travaille le contrôle émotionnel yogique, la sérénité intérieure, la fusion psyché/soma dans la zénitude absolue, bref, le non-jeu apathique du trépané (ou du gweilo qui sait ses talents sous-payés). Et il a tout à fait raison de choisir cette voie, car en face, Stuart Smith demeure une divinité mystique du cabotinage au regard enfiévré, capable de déstructurer la plus bête ligne de dialogue pour la recréer avec plein de muscles faciaux en plus.

 


Les combattants se préparent... et c'est parti !



Emporté par mes sentiments pour la cause ninja, irai-je jusqu'à dire que "The Ultimate Ninja" est un bon film ? Bien sûr que non, y'a tout de même pas écrit nunuche décérébrée sur mon front. Mais si l'on peut éprouver à sa vision une tendre sympathie, c'est bien grâce aux intrépides voyageurs et autres citoyens du monde qui n'ont pas hésité à faire taire leurs insistants (et justifiés !) doutes quant à la justesse de leurs choix de carrière, pour accepter d'incarner d'improbables assassins occidentaux bigarrés qui, aujourd'hui encore, continuent d'émerveiller ceux qui savent où les trouver. Alors so long Bruce. Et comme le disait très justement notre forumeur Benoît : "on n'était peut-être pas les fans dont tu avais rêvé, mais on gardera ton souvenir vivant".

 






- Kobal -
Moyenne : 1.50 / 5
Kobal
NOTE
1/ 5
John Nada
NOTE
2/ 5

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation

Le film ne semble pas avoir bénéficié de sortie française. Il faut donc se tourner vers une pléthore d'éditions de tous pays, dont le DVD anglais chez "Hollywood DVD".