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Twin Dragon Encounter

(1ère publication de cette chronique : 2011)
Twin Dragon Encounter

Titre original : Twin Dragon Encounter

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Paul Dunlop

Année : 1986

Nationalité : Canada

Durée : 1h13

Genre : M&M's canadiens

Acteurs principaux :B. Bob, Michael McNamara, Martin McNamara, Carol Nawrocki, Monica McKenna, Steve Johnson, Karl Adhihetty...

Kobal
NOTE
3.5/ 5

Si vous avez l'habitude de vous tenir informés de l'actualité nanarlandaise la plus brûlante en scrutant périodiquement le Top Chroniques de la team, vous devriez pouvoir instantanément citer le nom du chef-d'œuvre arrimé à la 15ème position du classement. Si ce n'est pas le cas, allez relire les 800 et quelque chroniques du site, puis revenez à celle-ci.


Bien, maintenant que les béotiens sont partis, savourons de nous retrouver en noble compagnie, c'est-à-dire nous-mêmes, la véritable élite. Mais qui dit êtres supérieurs, dit grandes responsabilités (dixit un mec en justaucorps). Fronçons donc légèrement les sourcils, prenons un air pénétré mais distingué et parlons sérieusement. Car l'heure est grave : vient enfin d'être découvert ce qui jusqu'à présent ne constituait qu'un mythe qui enfiévra de désir plus d'une paire d'yeux. Non, il ne s'agit pas d'une version française du 3ème film de Paul Kener, "The Streak Car Company". Ni du director's cut de 4h30 de "Devil Story". Ni même d'une copie numérique de "Comtesse Hachisch". Nanardeurs, tempérez vos ardeurs !



Le trésor du jour est une pépite de nanardise à même de ravir les fanatiques de kickbox-survival canadien. Non, vous ne rêvez plus, nous avons enfin retrouvé... la préquelle de "Dragon Kickboxers" ! Jouez aux bois, résonnez mulettes ! Vous imaginez bien que nul homme au monde n'aurait pu contenir tout le talent des messianiques jumeaux McNamara au sein d'un seul et unique métrage. Et bien "Twin Dragon Encounter" est le témoignage de cette fracassante entrée des frangins dans le monde jusqu'alors désœuvré du cinéma.


Du cinéma immature pour un public mature.


Afin de mieux vous faire comprendre la subtile relation qui unit ces deux films, nous emprunterons à Sam Raimi le matériel nécessaire à une grossière comparaison. En effet, nous pourrions rapidement dire que "Dragon Kickboxers" est à "Twin Dragon Encounter" ce que "Evil Dead 2" est à "Evil Dead" : un remake plus friqué qui fait également office de suite. Nous retrouvons donc dans le présent film cette même ligne scénaristique à la pureté archétypale : les McNamara sont les vrais hommes, et même les hommes vrais (les "Real Men" comme ils se plaisent à le dire eux-mêmes). Ne cherchez pas leur nom dans le dictionnaire, ils apparaissent directement à la définition de virilité. A côté d'eux, Manowar est un dortoir d'adolescentes de 13 ans et l'univers de Gor une sucrerie fantaisiste à la guimauve.


La preuve par le texte...


...et par l'image.


Entre deux cours de kickboxing concédés aux humbles mortels avec qui ils ont daigné sympathiser, les jumeaux assurent sans sourciller leur fonction de justiciers urbains. Au volant de leurs vans respectifs (il n'y a pas assez de place pour l'ego de deux McNamara dans un seul van), ils scrutent de leur regard perçant le paysage à la recherche de dangereuses bandes criminelles à éradiquer. Un minimum d'agresseurs est en effet requis, car sinon, en dignes chasseurs éco-responsables, ils rejettent à la rue la proie qui n'a pas encore atteint sa pleine maturité. En dehors de ce pré-requis, aucune situation ne rebute les hommes vrais. Tentative de viol ou même prise d'otage canine (authentique !), le résultat est le même : hachis de loubards. C'est bien simple, il suffit qu'un Dragon canadien observe les statistiques de la délinquance pour que celles-ci s'écrasent, la queue basse.


Martin rythme les pulsations de ses envies de justice en frappant le volant avec ses tonfas.


Une racaille qui ne se doute pas de l'arrivée imminente d'un kärcher humain.


Une tentative désespérée d'échapper à un destin inéluctable. Le Yorkshire a même droit à l'accolade.


Bien entendu, d'aussi nobles êtres ont le droit à de méritées vacances dans les vastes étendues sauvages du fier Canada. Accompagnés de ce que l'on devine être leurs offrandes féminines du moment, ils ne sont alors que sagesse, paisibilité, zénitude, osmose avec la Nature : quand un McNamara hurle à la Lune, les loups lui répondent (tout aussi authentique !). Une quiétude qui ne les empêche toutefois pas de savoir remettre à leur place quelques bouseux malpolis en leur fracassant la tronche par surprise. De même, assister à la rencontre entre les McNamara et la fameuse milice rurale des Peoples Private Army est une véritable leçon de maîtrise de soi et d'impassibilité. Une attaque dans le dos, quelques coups à la nuque des gredins, et hop, la situation est réglée sans que quiconque ait perdu son calme.


Après "Dragon Hunt", "Dragon Fishing" ?


Des routiers inconscients qui auraient mieux fait d'avoir un accident de la route ce jour-là.


Les gars de la Peoples Private Army sont surnommés par les journaux les "week-end warriors". De là à les imaginer mener une vie familiale et professionnelle tout ce qu'il y a plus de banale en semaine, avec pour seul loisir innocent du week-end la chasse à l'homme...


Faut dire qu'à les voir faire tranquillement du canoë, on pourrait s'y laisser prendre.


Malheureusement pour eux, les êtres humains sont vaniteux. Leur désir de vengeance les rend parfois aveugles à l'aura des hommes vrais et les pousse à s'acharner en vain. Les plus éveillés d'entre vous auront bien vite compris qu'un cache-cache meurtrier se prépare dans les forêts canadiennes, et que les ploucs feraient bien mieux de numéroter dès à présent leurs abattis s'ils souhaitent que les médecins légistes puissent reconstituer leurs carcasses à l'issue de la partie.


Les Twin Dragons s'entraînent à découper en morceaux des formes humanoïdes.


Dans "Twin Dragon Encounter", les inamovibles McNamara sont donc déjà cette incroyable paire de connards auto-satisfaits que tous les nanardeurs ont appris à aimer. Ignorant tout du concept de lâcheté au profit d'une recherche effrénée de l'efficacité sans vergogne, ils n'hésitent jamais à monter les plans d'attaque les moins honorables, frappant de toutes parts et le plus souvent possible par surprise leurs adversaires, sans se gêner pour molester une victime déjà au sol. Certes, le bodycount est cette fois de 0 (ils mettent des embouts plats sur leurs flèches), mais c'est sans doute parce qu'ils préfèrent causer des lésions douloureuses à une mort trop rapide.


Les spécialistes du coup de latte dans la gueule, par derrière.


Mais siii j'vous dis, il bougeait encore le sourcil !


Même leurs copines sont passées maîtresses dans la connaissance des points vitaux.


Leur sens de l'humour est tout aussi finaud : il y a en effet de quoi s'esclaffer lorsqu'ils simulent auprès de leurs copines une attaque nocturne alors qu'elles sont déjà effrayées par la présence inquiétante de la Peoples Private Army. Ils ne seront d'ailleurs pas décontenancés pour un sou par l'enlèvement de celles-ci, organisant tranquillement leur petite guérilla champêtre - ce sont bien entendu des survivalistes accomplis qui ont planqué dans la forêt l'équipement suffisant pour faire face à la Troisième Guerre mondiale elle-même - sans se soucier des conséquences de leurs exactions sur l'intégrité physique et sexuelle de ces dames. Placardant leurs noms et logo sur tout ce qu'ils touchent, les McNamara paraissent sortir tout droit d'un comic-book de super-héros ou d'un mauvais dessin animé.


Une capture d'écran trop suggestive pour qu'on s'autorise à la commenter.


Un face à face déséquilibré.


Qui a pimp-ridé le van de l'Agence Tous Risques ?


Les posters des McNamara sont un équivalent de l'urine des canidés.


Le fin du fin du merchandising.


Joie, leur indispensable némésis est la même que dans "Dragon Kickboxer" : Jake, plus svelte, équipé de ses deux mains et la mèche au vent. Le bougre mâchonne son cigare, encourage ses troupes de guerriers du dimanche, s'entraîne à balancer ses vannes sentencieuses, mais surtout, il excelle déjà dans l'art du cabotinage grimaçant, parvenant à donner une substance impressionnante à un rôle qui aurait rapidement pu être étouffé par la prestation des jumeaux. Il faut le voir mettre des coups de pieds hargneux dans un poster des Twin Dragons ! Bref, la plus-value nanarde parfaite. Sa milice est certes exsangue de sbires par trop exotiques (oubliez les Maitres du Monstre, les Gros Lards et autres Masques de la Mort Rouge, il faudra ici se contenter de troufions rednecks, dont certains sortent à peine de la puberté), mais c'est tout de même avec plaisir que l'on retrouve dans ses rangs certains hommes de main au visage familier, avec leur look en pleine affirmation.


Le revoilà !


Et il a oublié sa crème solaire !


A noter que B. Bob, l'acteur qui incarne Jake, possède une voix grave impressionnante mais très cartoonesque.


Mais nous l'avons dit, "Twin Dragon Encounter" est un premier essai, visant le marché de la vidéo. Le budget est riquiqui et cela se ressent à l'écran : la prise de son et la photo sont plus cheap, la réalisation fait des efforts pour paraître professionnelle mais demeure approximative (unique film de Paul Dunlop à ce poste, qui migrera à la direction photo par la suite). De plus, la mise en scène des affrontements est assez surprenante : reconnaissons une recherche d'efficacité dans le rendu des coups portés, mais pourquoi diable de nombreuses séquences sont-elles au ralenti, accompagnées d'étrange sons distordus ? Certes, on peut comprendre la volonté d'adapter le rythme de défilement à la vitesse quasi-luminique des frappes des Dragons canadiens (bien que cela renforce l'aspect pataud de la chorégraphie), mais il y a de quoi rester circonspect devant l'impact artistique de bruitages si bizarroïdes qu'ils donnent au spectateur l'impression d'avoir été brutalement projeté dans la Quatrième Dimension.


Festival de sbires.


Et y'a même Karl Adhihetty, mon petit chouchou de "Dragon Kickboxer", qui est au rendez-vous.


Heureusement, les jumeaux n'ont pas mégoté sur l'accompagnement musical. Si certains thèmes sont sans conteste des œuvres en midi, il serait criminel de passer sous silence la chanson phare de cet opus : "Right to Fight", de Billy Butt (sic). Une expérience auditive à même de faire revivre les 80's dans votre salon, cet hymne à la révolte réveillera en vous une énergie insoupçonnée, et je ne serais pas surpris que, sans même vous en apercevoir, vous finissiez debout devant votre télévision, le poing brandi, scandant avec fébrilité les paroles de Mr Butt.

After every night comes another day
After very day comes another night
We are working haaard
And ready to fiiight !
[...]
WE'RE GONNA FIGHT !!! FOR THE RIGHT TO FIGHT !!! WE'RE GONNA FIGHT !!! FOR THE RIGHT TO FIGHT !!! WE'RE GONNA FIGHT !!! FIGHT FOR THE RIGHT !!! YEAYEAYEAAAH !!!
(bis)


Il faut savoir que les McNamara diffusent la BO de leur film dans leur van. Terrifiante mise en abîme.


Une jaquette digne d'un jeu vidéo Amstrad. Remarquez, certaines chansons du film n'auraient pas dépareillé sur cette machine.


Enfin, le film souffre également de l'absence d'une version française aussi enthousiasmante que celle de son cadet. Mais attention, n'allez pas croire que ces menus défauts gâchent le plaisir. Le charme McNamara opère bel et bien à l'écran et magnétise chaque séquence grâce à la présence de Martin et Michael. Et "Twin Dragon Encounter" n'a pas à rougir de ses grands moments de n'importe quoi, telle cette version réactualisée de l'exploit de Guillaume Tell avec... un nunchaku ! Ou lorsque les frangins saccagent le camp de leurs adversaires... en faisant des trous dans leurs casseroles !


Une capture d'écran qui aurait pu inspirer Gotlib.


Une capture d'écran qui aurait pu inspirer Godfrey Ho.


En dehors de la généreuse rasade de crétinerie que le film a à offrir à son spectateur, ce premier essai est tout aussi fascinant par son absence totale de prise de distance avec la réalité, ne se départant jamais de son aspect quasi-documentaire comme s'il narrait sans artifice le quotidien le plus banal des frères McNamara, le tout arrosé d'une hallucinante dose d'égotisme (tous les autres rôles ne sont finalement là que pour leur servir la soupe, bien souvent avec un remarquable manque de finesse). Et ce n'est pas cet autre écrin à leur gloire qu'est "Dragon Kickboxers" qui prouvera le contraire. La confusion ainsi entretenue entre les acteurs et les personnages, à l'image de cette confusion entre la biographie des McNamara et l'histoire du kickboxing, a de quoi interroger sur l'image que les jumeaux ont d'eux-mêmes. Voire sur leur structuration psychique. Même Chuck Norris ou Steven Seagal, adeptes de l'iconisation ou de la mise en scène de leur propre vie, ne sont pas allés aussi loin. Une différence qui tient sans doute au fait que ces deux-là sont des acteurs professionnels, là où les jumeaux sont tout d'abord... et bien, des hommes vrais ?


Les McNamara en goguette à Cannes, pour présenter "Dragon Hunt".


Au nanaromètre, "Twin Dragon Encounter" est donc objectivement un cran en-dessous de sa suite. Mais il n'en reste pas moins une savoureuse gourmandise à considérer comme une grande répétition avant d'accoucher du chef-d'œuvre indéboulonnable qu'est "Dragon Kickboxers". Ne reste désormais plus qu'à prier pour qu'un jour, le film auto-censuré des McNamara, "The Real Twin Dragons"(1), puisse enfin sortir de l'ombre où un odieux gouvernement le tapit, et ainsi continuer à propager la sainte parole de nos deux frangins qui ont su ne pas brader leur identité capillaire sous-nasale avec la fin des 80's.

L'entraînement McNamara


Une devanture avenante.


Des salles d'entraînement à l'ambiance feutrée pour les élèves.


Un hangar désaffecté pour les maîtres.


Un travail des abdos tout en douceur.

 



(1) D'après les informations disponibles sur leur site, le film, également titré "The Right to Fight", est un docu-fiction retraçant leur combat contre le gouvernement afin de faire reconnaitre le kickboxing au Canada. Le métrage aurait bénéficié d'une unique projection ciné au Festival de Toronto en 2003 (il existe en effet une vidéo de l'avant-première ainsi qu'une bande-annonce sur youtube). Mais, insatisfaits par la conclusion du documentaire, les McNamara ont décidé de bloquer sa distribution tant qu'ils ne pourraient pas s'attribuer le mérite d'avoir définitivement modifié la position de l'administration sur les "nouveaux" sports de combat. Ils ont alors déposé une plainte contre la commission gouvernementale d'athlétisme afin de "révéler au grand jour le complot" qui viserait à empêcher la légalisation de la pratique du MMA ou de l'UFC dans l'Ontario. Les McNamara sembleraient considérer leur refus de sortir le film comme un possible moyen de pression sur le gouvernement (!!). Moi, je veux bien faire du lobbying afin de permettre enfin la commercialisation de "The Real Twin Dragons", mais je suis pas sûr qu'une foule de nanarophiles soit suffisante pour faire basculer la politique canadienne... Mais que les fans soient rassurés, aux dernières nouvelles, les charges pénales d'une action en justice intentée par la commission d'athlétisme à l'encontre de Martin et Michael pour organisation de combats illégaux viennent d'être levées. Il faut tout de même reconnaitre aux McNamara un véritable talent pour inviter ainsi la fiction au sein de la réalité. Je me laisserais bien aller à parler de personnalité paranoïaque, mais je me tairai, n'ayant pas envie de me retrouver sauvagement kickboxé dans le dos.


Un peu de rêve.


En avril 2011, l'Ontario a finalement légalisé la pratique du MMA, harmonisant ainsi sa politique avec les autres provinces canadiennes. Depuis nous n'avons plus trop de nouvelles des frangins, qui ont quitté le devant de la scène du fight canadien, ayant semble t-il cédé leur école de kickboxing ! Nous voilà bien orphelins...

- Kobal -

Entretiens

Moyenne : 3.00 / 5
Kobal
NOTE
3.5/ 5
Barracuda
NOTE
2/ 5
Jack Tillman
NOTE
3.5/ 5

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation

Le film est disponible dans une antédiluvienne édition VHS nord-américaine de chez "Palace Entertainment Corporation". Il se pourrait qu'il existe une édition DVD, vendue en exclusivité sur le site des McNamara, complétement mort depuis l'écriture de cette chronique, mais ses spécificités sont inconnues.

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