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Revamped

(1ère publication de cette chronique : 2010)
Revamped

Titre original : Revamped

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Jeff Rector

Année : 2007

Nationalité : Etats-Unis

Durée : 1h27

Genre : (Trans)fusion des genres

Acteurs principaux :Fred Williamson, Deron McBee, Billy Drago, Sam J. Jones, Vernon Wells, Martin Kove, Elise Muller, Jeff Rector, Paul Michael Robinson, Reggie Bannister, Carel Struycken, R.A. Mihailoff, Victor Lundin, Christa Campbell

Wolfwood
NOTE
1.75/ 5

On n'est jamais si bien servi que par soi-même. Ça, Jeff Rector l'a bien compris. Lassé de traîner sa carcasse dans les arrière-cours d'Hollywood sans jamais atteindre le haut de l'affiche, Jeff a décidé de se donner les moyens de ses ambitions en créant des films dont il serait enfin la vedette. Après quelques moyens-métrages, voilà notre ami parti dans un projet encore plus ambitieux : "Revamped". Cette fois Jeff en est sûr, à lui la renommée et les papiers élogieux faisant de lui le nouveau Sam Raimi. Ouais. Il est bien gentil l'ami Rector, mais au vu du résultat, faudra qu'il se contente d'une bafouille sur un site de barges et qu'il attende son tour entre un Philippe Clair et un Jesus Franco.


Mais qu'a-t-il fait pour en arriver là ? Et bien, tout commence par l'une des idées les plus singulières du cinéma fantastique. Apprenant les infidélités de sa femme, Richard (Rector himself) décide de mettre fin à ses jours, mais est arrêté dans son geste par une pub qui lui propose de devenir un suceur de sang en appelant un numéro de téléphone. Charmé par cette offre, notre lascar décroche son combiné pour pouvoir mieux se venger de sa chère et tendre. A croire que ce brave homme n'a jamais entendu parler d'une autre race de démons : les avocats. Néanmoins, voilà Richard embarqué dans une succession d'événements rocambolesques qui, de coups de théâtre en twists douteux, l'amèneront au milieu d'un conflit entre différentes factions de vampires et un groupe paramilitaire qui souhaite éradiquer nos buveurs d'hémoglobine.


Bonjour et bienvenue sur Satan TV. A 20h40, retrouvez notre télé réalité "Devil Story". Puis à 23h, n'oubliez pas votre série, "Amour, Gloire et Trépanation".

Appelez vite, c'est urgent !!


De suite, il faut souligner l'une des particularités de ce film, à savoir sa volonté d'intégrer des "passages humoristiques" (notez l'utilisation de guillemets). Il suffit de voir Richard foirer lamentablement ses tentatives de suicide pour comprendre qu'une part de second degré est bien présente à l'écran. On ne cesse pourtant de se demander si tel était bien la volonté initiale de l'auteur, dans la mesure où le script de "Revamped" est globalement traité avec un certain sérieux. Un peu comme si, voyant qu'il ne réaliserait pas un nouveau classique du cinéma fantastique, Jeff avait soudain changé son arbalète d'épaule et pris sur lui d'ajouter quelques scènes comiques afin d'arrondir les angles. Ou alors, à l'instar d'autres productions, il aura sans doute voulu intégrer quelques vannes pour détendre l'atmosphère entre deux séances dramatiques. Quoiqu'il en soit, l'effet produit se rapproche de celui d'un snuff movie dans lequel on verrait périodiquement apparaître un Bernard Menez chantant « Jolie Poupée » pendant qu'on s'égorge autour de lui. C'est tellement hors sujet qu'on finit par rire de ces séquences, mais pas pour les bonnes raisons...


Bah quoi ? On a tous ce genre de bouquin à la maison.

Marre de sucer ? Choisissez Hemorette.


Outre son approche hasardeuse, l'intrigue trouble également par sa confusion. S'enchaînant comme dans un mauvais soap, les rebondissements semblent avoir été écrits selon l'intuition du moment, sans respecter les faits précédents ni même les protagonistes, certains changeant radicalement de motivations d'une scène à l'autre. A ce point, on croirait même qu'une bonne partie du casting est schizophrène. Si, dans un film ordinaire, voir le personnage central passer en moins de dix minutes du statut de tueur en pleine vendetta à celui de sauveur du monde est totalement absurde, ici, tout passe comme une lettre à la poste. Et tant pis si les événements tiennent entre eux par des ficelles scénaristiques dignes de cordes d'amarrage. Déstabilisant de bout en bout, le script est ponctuellement gratiné de faits absurdes qui nous feront dire qu'à force de vouloir aller partout, le film de Jeff n'arrive nulle part.


Mary, mère d'une petite fille mais kidnappée par les vampires pour sa virginité. Ou la dimension religieuse au service de l'incohérence scénaristique.

Un fusil laser sorti de nulle part et qui va y retourner prestement.


La direction d'acteurs suit le mouvement, avec une cohorte de seconds rôles cultivant l'amour du cabotinage avec passion. Pour tenter d'apporter une caution horrifique à un film qui en a bien besoin - et espérer intéresser des diffuseurs potentiels - Jeff Rector a recours à la pratique du caméo. De Reggie Bannister qui jouait dans les 4 "Phantasm" en passant par le Leatherface de "Massacre à la tronçonneuse" troisième du nom, c'est la foire aux quatrièmes couteaux rouillés ! En guise de tronches familières, on citera également Vernon Wells (le cultissime Bennett de "Commando", "Circuitry Man") en tenancier de bar, Carel Struycken (Lurch dans "La Famille Addams") en croque-mort plus tout un tas d'autres comédiens ayant usé leurs guenilles dans des séries diverses et variées. Espérons pour lui que certains sont venus bénévolement sinon, on sait enfin où est passé le budget du film.


Quelques personnages très motivés. En bas à droite, Elise Muller, déjà compromise dans "Sharkman".

Vernon Wells, derrière son comptoir, engueule un biker et passe à la compta.

Carel Struycken.


R.A. Mihailoff (Leatherface dans "Massacre à la tronçonneuse 3").

Reggie Bannister ne va pas faire long feu.


Mais le devant de la scène est à l'avenant. Outre Sam J. Jones, déjà vu dans "Gangland 2010", "Les Boys en Enfer" et surtout "Flash Gordon", c'est avec joie que l'on retrouve quelques habitués des lieux comme Martin Kove et Fred Williamson. S'il est difficile d'accabler Fredo qui passe quelques savons dans son bureau (comptez une heure de tournage max pour toutes ses scènes), Martin livre quant à lui une prestation purement syndicale. Totalement conscient de ce qu'il joue, le comédien prend son rôle par-dessus la jambe, ne voyant sans doute dans ce film qu'un moyen de payer sa facture d'électricité. On est loin du j'menfoutisme complet de "Barbarian" mais l'air détaché du bonhomme reflète bien l'état d'esprit avec lequel il a abordé ce tournage.


L'impatient Fred Williamson.


Sam J. Jones, le Van Helsing de monoprix. Notez la cicatrice qui se balade sur le visage d'une scène à l'autre.


A noter qu'il ne sera pas loin de se faire piquer la vedette par son coéquipier, un certain Paul Michael Robinson qui, dans le délicat registre du sidekick, redéfinit à chaque apparition la formule « jouer comme une patate ». Touchons également un petit mot sur un des acolytes de Richard, le professeur Van Dyke (Victor Lundin), inventeur de trucs qui ne servent à rien ou sortant d'on ne sait où. Proche de la mono expressivité quoiqu'on lui demande de jouer, on ne s'étonnerait pas de le voir tirer la même tronche si quelqu'un lui annonçait l'arrivée de gnous radioactifs au beau milieu du plateau.


Martin Kove (à droite) et son ineffable partenaire.

Victor Lundin, l'homme aux cent expressions (une par film).


Afin d'équilibrer les débats, le camp adverse est représenté par une doublette habituée du surjeu outrancier, j'ai nommé Deron McBee et Billy Drago. Fidèle à sa légende, Billy ne ratera aucune de ses maigres occasions pour propulser son personnage vers des hauts niveaux d'excès. Incarnant un grand chef vampire voulant plonger le monde dans l'obscurité via un stratagème incertain, maître Drago s'en donne à cœur joie dans les sourires démoniaques et regards vicieux. Un registre qu'il connaît par cœur mais dont on ne se lasse pas. Dommage que ses apparitions se comptent sur les doigts d'une main...



Billy Drago, absolument royal dans le rôle de Vladimus !


Pour compenser, Deron se trouve heureusement être un excellent adjoint. Alliant la carrure de Matthias Hues et le jeu de Stuart Smith, le père Mc Bee ne néglige aucun de ses passages à l'écran pour nous livrer une performance dont il a le secret. Suant, grognant, beuglant la moindre réplique comme un damné, Deron en fait comme toujours des gigatonnes, irradiant littéralement la pellicule dès qu'il apparaît dans le cadre. Un poil original, on le verra aussi jouer une pseudo scène de fesses où là encore, son style si particulier fait des merveilles entre postures d'extase outrancières et gémissements outrés. Autant dire que ces deux là envoient du très lourd !





Sacré Deron !


Mais la vraie vedette, c'est Jeff Rector. En bon homme orchestre, le monsieur ne s'est pas contenté d'écrire, produire et réaliser le film : il en a fait aussi un écrin à sa propre gloire. Et c'est bien compréhensible, tant on voit mal qui serait assez dérangé pour lui confier un rôle conséquent. Charismatique comme un plat de nouilles trop cuites, Jeff est l'un des héros les moins crédibles qui soit, tenant plus du cadre sup' de PME que du beau ténébreux. Empâté et masquant mal de sérieux problèmes de justesse, Jeff livre un catalogue de toutes les expressions possibles, croyant peut-être pouvoir se faire remarquer par un grand nom du cinéma. Hélas, que ce soit dans le burlesque ou la tragédie, Jeff est perpétuellement à côté de ses pompes et contribue pour beaucoup à la nullité d'un film pourtant conçu sur mesure, un véritable comble !


Mou, grillé et bien trop gras, non il ne s'agit pas d'une chipolata, mais de Jeff Rector.


Plus vraiment à une connerie près, sa réalisation est à l'image du reste. Si Jeff est le genre de gars à filmer une rave gothique façon ambiance de kermesse, les scènes d'action virent elles à la fête à neuneu. Semblant avoir été tournée en une prise et grossièrement accélérée pour lui donner un peu de peps, la moindre empoignade apparaît risible tant elle semble avoir été réglée par un chorégraphe en état de mort cérébrale. Parlons aussi de la production pour évoquer le budget récolté par Jeff, probablement grâce à la vente de son abri de jardin. Ayant visiblement choisi ses décors sur le simple critère qu'il s'agissait de squats vides (prix de location = gratos), Rector n'a pas lésiné sur les effets en tous genres. Hélas pour lui, difficile de ne pas sourire devant cette orgie de canines en plastoc et ketchup de Leaderprice, qui plonge plus encore son "Revamped" dans un profond ridicule.



Danser un petit slow, trinquer au Banga... finalement ces histoires de messes noires, c'est juste pour se donner un genre.


Des figurants hauts en couleur.

"Jeff Leroy style" !


Plus proche du brave tocard que de Bram Stoker, Jeff Rector nous livre un film boiteux et un tantinet poussif, dont on a du mal à savoir jusqu'à quel point il assume sa bêtise. La seule certitude, c'est que la somme d'imperfections qui le compose et sa brochette d'acteurs en font un divertissement acceptable qui, a défaut d'intenses fous rires, se laisse tout de même suivre avec un plaisir coupable. Certes, Mister Rector espérait sans doute plus, et qui sait, le chef-d'œuvre tant désiré viendra peut-être. Allez Jeff, accroche-toi. Après tout, si tu persévères dans l'absurde, nous autres à Nanarland ne pouvons qu'être derrière toi. Plus que la gloire, la reconnaissance de vrais amateurs, ça n'est déjà pas si mal.


- Et là comme ça, j'ai l'air inquiétant ?
- NOONN !!

 

- Wolfwood -
Moyenne : 2.42 / 5
Wolfwood
NOTE
1.75/ 5
Kobal
NOTE
3/ 5
Rico
NOTE
2.5/ 5

Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation

Sortie en DVD aux États-Unis chez "MTI Home Video", "Revamped" n'a pas encore été exploité par chez nous. Jeff Rector devra attendre un peu pour devenir une star mondiale.


Une affiche faisant la promo de la première du film. En double programme : une invitation à donner son sang.