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Janbaaz


Janbaaz

Titre original : Janbaaz

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Altaf Hussain

Année : 1987

Nationalité : Pakistan

Durée : 2h50

Genre : Moumoute et moustache

Acteurs principaux :Sultan Rahi, Anjuman, Ghulam Mohiuddin, Sitara, Sangeeta

Sultan Rahi
NOTE
4/ 5


Une affiche pleine de promesses...


Le cinéma pakistanais a quelque chose de magique. Pour faire simple, il s’agit d’une forme turquisée à l’extrême du cinéma du sous-continent indien. Les décors sont de carton pâte et les acteurs ignorent totalement qu’ils ne sont pas sur les planches d'un théâtre ; ou bien sont-ils simplement mauvais, et les figurants atteints d’apathie chronique. L’un des points forts de ce type de cinéma est la façon de tourner les scènes de bagarre. Le caméraman doit utiliser tout son génie pour faire croire qu’en face de lui se trouvent de vrais combattants tout droit sortis d’un bus de moines de Shaolin qui feraient du tourisme dans le coin. L’exagération du jeu des personnages est, oui, volontaire d’une certaine manière, puisqu’on reprend ici certains codes de théâtre, comme le tournage de dos à celui à qui l’on parle. Car dans la vraie vie ce n’est pas comme ça, je vous assure.


Le héros c'est lui. Lui et ses cheveux.

Le rose lui va à merveille.



"Non mais qui m'a donné des figurants pareils ?!? Hop hop hop, on se bouge là-dedans !"


Avant de se lancer dans le visionnage insensé de « Janbaaz », il est bon de savoir que ce monument du Lollywood (nom donné au films tournés à Lahore, au Pakistan) des années 80 n’a pas eu la chance d’être sous-titré par qui que ce soit. Tout est donc en penjâbi, ce qui, au final n’a pas grande importance puisque le scénario, identique aux autres productions du coin, est cousu de fil blanc.


Un méchant.

Encore un méchant.



Toujours un méchant.

Les ninjas peuvent aller se rhabiller.


Le personnage principal, c’est la mégastar pakistanaise Sultan Rahi, alors âgé de 49 ans, homme à moustache colérique et très bon acteur, selon des critères qui nous sont, certes, totalement étrangers. L’idole est elle-même entourée d’un aréopage de comédiens hors pairs.


Ghulam Mohiuddin, de retour des Amériques, joue les tombeurs.

La fille du méchant est sous le charme. Elle voudrait bien se précipiter sur lui mais l'ascenseur en plexiglas n'avance pas.

Mais Ghulam en aime une autre, une plus dodue, une avec casque de moto.

J'ai l'étrange impression qu'il va se prendre une correction, l'animal..

Bizarre, cette impression persiste.


Afin de poser l’histoire, le réalisateur explique tout en longueur et en chanson comment les deux héros sont devenus copains comme cochons et se sont ensuite perdus de vue. Sultan Rahi, ayant vu sa mère mourir devant lui, se retrouve seul, pauvre petite chose, dans un monde de dureté qui en fera un vrai rebelle avec mulette indomptable. De son côté, Ghulam Mohiuddin a profité de l’argent de son père pour aller faire des études à l’étranger. Preuve en est de son occidentalisme poussé : il ne porte pas de moustache, une faute de goût inadmissible qui jure avec le reste du casting.
On retrouve Sultan Rahi, des années plus tard, occupé à combattre les voyous qui font du tort au petit commerce. Si l’on suit bien le scénario, celui-ci devrait être âgé, au maximum, de trente ans. Y a pas à dire, la moustache, ça te vieillit un homme.


Dans son enfance, le jeune Sultan avait déjà fort affaire avec les karatékas de son quartier.

"C'est moi qui ai le plus gros couteau !"

Moui, sans le casque aussi ça le fait.

Tout se joue sur la moustache quand on y pense.

"Oui, la coiffure nuque longue, c'est très surfait !"

"Mouahaha ! Vous êtes tous jaloux, voilà tout !"


Il est à noter que, l’époque aidant mais n’expliquant pas tout, la bande-son est magistrale, faite d’envolées lyriques au synthé mêlées de bruitages impressionnants. Ainsi, lorsque Anjuman arrive pour la première fois devant la caméra, toute la puissance de son personnage est soulignée par des effets sonores du type « L’homme qui valait trois milliards ». Ghulam Mohiuddin, qui est riche comme Crésus, s’étant brouillé avec son paternel pour une histoire de mariage arrangé avec la fille du méchant, se retrouve à bosser dans un garage où il rencontre sa dulcinée, jouée par Anjuman. Sultan Rahi reconnaît son ami, après une baston et une scène au chapeau d’anthologie piquée à un film de Sergio Leone, et vas-y que je te fais des mamours. De notre côté, nous, spectateurs hagards, avons droit à une pause.


"Pop-corn, crèmes glacées !"


Pendant ce temps, le méchant, qui est là depuis le début à faire régner la terreur dans la ville, énervé par le travail bâclé de son décorateur d’intérieur, décide que c’en est trop, l’honneur de la famille étant en jeu dans cette histoire de mariage arrangé. Il est à noter que, depuis le début de l’histoire, ce dernier tente de refourguer sa fille à Ghulam. Lors de la narration de l’enfance de nos deux héros, on aperçoit donc une gamine, petite-fille du producteur que ça ne m’étonnerait pas, amorphe et à première vue tétanisée.


Moustache + nuque longue + chapeau de cow-boy. Rien à rajouter, la classe totale !

Si on ajoute à cela la moto, qui peut lui résister ?

Le méchant, coincé dans l'ascenseur.

C'est étrange mais j'ai une soudaine envie de faire du catch.


Malgré les pièges tendus pas son ennemi, Sultan Rahi réussira-t-il à sauver son pote et sa famille avant qu’il ne soit trop tard ? Car non content de racketter les pauvres gens, le méchant a décidé que le père de Ghulam devait mourir, et si possible de manière la plus ridicule possible. Pour cela, il lui aura fallu installer, au milieu du salon, une grande cage de verre du plus beau kitsch, bien en accord avec la statue égyptienne géante et les totems amérindiens, où est diffusée une terrible fumée réfrigérante. Brrr, quel cruauté l’animal ! La scène finale est bien entendu truffée de gags involontaires (ou alors il faut vraiment être vicieux) et (de tentatives) d’effets spéciaux bricolés.


En parlant de catch : le monstre de fin de tableau est un beau morceau.

L'animal sur pied.

"Arrêtez ces effets de caméra, ça me rend malade !"

Le méchant :"Sultan, ta moustache c'est de la gnognotte !"


Pour autant, ce film n’a-t-il que des défauts, s’il on fait abstraction de son côté bidonnesque ? En fait non, car il en ressort une fraîcheur incroyable, preuve que les Pakistanais savent faire du cinéma populaire. Le Lahore de studio est assez proche du Lahore véritable, si ce n’est le fait que l’héroïne bouboule travaille en pantalon moulant du meilleur goût, en jean ou en cuir, dans un garage, ce qui n’est pas très crédible. Bien entendu, mis à part l’entracte, le spectateur ahuri peut souffler entre deux bagarres de rues avec des morceaux musicaux du plus bel effet. Anjuman, la copine dodue de Ghulam, entraîne ainsi tout son monde, des filles dans le parc aux méchants à qui elle vient juste de mettre une raclée, dans une danse envoûtante. Et là, surprise, du moins pour ceux qui ne connaissent pas ce cinéma : les synthés sont remplacés par de la musique traditionnelle avec tabla comme les Indiens ne savent plus en faire.
Acteurs et figurants au charisme autre, costumes d’un mauvais goût réjouissant, castagnes insensées (Sultan Rahi n’ayant, vraisemblablement, jamais pris de cours de karaté de sa vie) : « Janbaaz » constitue la quintessence des films penjâbis de facture douteuse.


Sultan Rahi, comédien de génie, nous montre toute l'étendue de son talent :


Sultan étonné.

Sultan amoureux.

Sultan heureux.



- Sultan Rahi -

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation
Le film se déniche dans les bacs des vendeurs de vidéos pakistanaises à Paris (hélas pas en province !), car oui, de tels bienfaiteurs existent. L'éditeur Sadaf a ressorti le film Janbaaz au format DVD mais il ne bénéficie ni de bonus ni même de sous-titres. Étant donné la longueur du film, on voit de toute façon mal où ils auraient pu rajouter quoi que ce soit.