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Invasion of the Blood Farmers


Invasion of the Blood Farmers

Titre original : Invasion of the Blood Farmers

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Ed Adlum

Année : 1972

Nationalité : Etats-Unis

Durée : 1h24

Genre : La secte des rednecks vampires

Acteurs principaux :Norman Kelley, Tanna Hunter, Bruce Detrick, Paul Craig Jennings, Richard Erickson, Cynthia Fleming, Jack Neubeck

Isatis
NOTE
4/ 5



Ce qu’il y a de bien avec les films américains ultra-Z des années 1970, c’est leur aspect d’artisanat légèrement cradingue : on a vraiment l’impression de voir des films produits par la PME de chez Gérard, destinés à une consommation rapide dans des lieux glauques, par un public plus ou moins distrait et/ou dégénéré. C’est un beau spécimen de ce genre de cinéma que cet « Invasion of the Blood Farmers », qui suinte par toutes les images d’une misère oppressante.


Une édition VHS britannique.



Tourné en quelques week-ends avec, d’après la légende, une équipe de comédiens plus ou moins professionnels rémunérés en packs de bière, le film coûta la coquette somme de 24 000 $ et, toujours selon la rumeur, ne parvint pas à rembourser son budget de revient lors de sa première exploitation commerciale. Si tel a véritablement été le cas, la postérité est venue venger le réalisateur, car son film est désormais disponible en DVD et consultable par tous les cinéphiles pervers. Tel un Van Gogh du mauvais cinéma d’horreur, Ed Adlum, rentré également dans l’histoire comme producteur du piteux « Shriek of the Mutilated » de Michael Findlay, peut désormais s’enorgueillir de voir le fruit de ses efforts exposé aux yeux de tous. Certes, tout le monde se paie sa fiole, mais au moins son film n’est pas oublié, c’est déjà ça.



Le ton est donné dès le générique : avec de gros plans sur une torche qui s’agite, de la brume rouge, une torche qui s’agite, des zigues encagoulés dans un paysage quasi volcanique, une torche qui s’agite… Une voix off hiératique nous apprend qu’ « Ils » sont là depuis la nuit des temps, ont été exilés par César, qu’Ils vivent parmi nous en secret en attendant le jour où leur race pourra de nouveau se répandre sur la Terre… Passé cette introduction, le film commence vraiment. Au bord d’une route, un homme couvert de sang titube, arrive dans un bar perdu au milieu de nulle part, et s’effondre raide mort en tirant la langue de grotesque manière. Nous sommes dans le trou du cul de l’Amérique profonde la plus reculée, où de méchants serial killers plus ou moins rednecks semblent à nouveau décidés à massacrer de braves gens à la tronçonneuse, ou à l’aide d’autres outils plus ou moins jardiniers. Sauf que là, il y a un twist qui va contribuer au ridicule total de l’entreprise, et transcender le simple concept de « fermiers sanglants ». Car contrairement à ce que le titre et l'affiche laissaient croire, le film ne s'est pas limité aux méfaits de fermiers dégénérés et meurtriers.





L'action change de décor ; nous sommes dans une jolie propriété, deux jeunes tourtereaux se promènent, papotent. Ils ont l’air si niaiseux que l’on se doute bien du sort funeste qui les attend. D’ailleurs, ils sont si pénibles qu’on le leur souhaiterait presque.




On apprend que le garçon (Don) travaille avec le père de la jeune fille (Jenny) qui est chercheur. D'ailleurs comme par hasard le père surgit dans le jardin pour appeler son assistant, et l’entraîne dans son laboratoire (on dirait plutôt ma cuisine dans laquelle on aurait placé un peu au hasard un microscope, trois fioles Erlenmeyer et quelques tubes à essais) pour observer un nouvelle découverte. Le sang de l’homme retrouvé mort dans le bar a en effet des propriétés incroyables : en gros, il fait des bulles, comme un mélange de grenadine et de levure chimique dans une expérience de chimie amusante pour les petits.


Un attirail digne de la dernière boîte du "Petit Chimiste".



Incroyable ! J'ai découvert qu'en soumettant aux radiations nanardes des extraits de jus de navet, on pouvait leur donner des vertus hilarantes !


Le sang mousseux : idéal pour amuser vos enfants à leurs anniversaires.



Dans le même temps, une scène dramatique se déroule dans une grange : une fille en robe à fleurs moche, attachée à un poteau, se fait aspirer le sang par un tuyau relié un compresseur : la glauquerie de la scène est quelque peu désamorcée par le bruit de succion, plus ou moins équivalent à celui que l’on obtient en aspirant les dernières gouttes d’une brique de lait chocolaté.



Le compresseur de la mort qui tue.



Mais quel est donc ce mystère, qu’est-ce que ce sang mousseux, et qui sont donc ces fermiers sanguinaires si bien équipés en turbines aspiratrices de globules ? Comme le pot aux roses est assez rapidement révélé, nous ne vous cacherons pas qu’il s’agit des méfaits d’une secte crypto-druidique, cachée en pleine campagne américaine, et préparant la résurrection de leur maîtresse, la Reine Onhorrid, dont le corps conservé dans un aquarium (enfin, dans un cercueil transparent…) a besoin, pour revenir à la vie, d’importantes transfusions de sang. Le chef des adeptes de cette Belle au Bois Dormant Gothique, un certain Creton, est interprété par l’illustre inconnu Paul Craig Jennings. Pourquoi citer ce comédien en particulier ? Tout simplement parce que son jeu est d’un outrance défiant l’entendement, qui nous ramène au beau temps du cinéma muet et des premiers parlants, voire aux mélodrames de boulevard du XIXème siècle : on ne peut même pas dire qu’il surjoue, il est le surjeu incarné. A chaque fois qu’il ouvre la bouche en VO, c’est le bonheur le plus total : on dirait une sorte de Vincent Price jeune, sous amphétamines et laissé totalement en roue libre.


Creton l'innommable.



L’interprétation est globalement l’un des points forts du film : entre amateurisme pur et simple et cabotinage forcené, les comédiens font de leur mieux, mais sont globalement à l’image d’un film dont la moindre image nous rappelle qu’il est fait de bric et de broc, tourné à l’arrache, dans des décors approximatifs, et dans des conditions d’incompétence technique à la limite de l’amateurisme pur et simple. Il faut dire un mot du Dr Kinski (un cousin de Klaus ?), médecin qui se révèle être un complice de la secte, tant le comédien (?) qui l’interprète traverse le film avec une platitude assez remarquable, récitant son texte comme s’il lisait le bottin du téléphone. Outre le fait qu’il est toujours surprenant de voir quelqu’un qui s’appelle Kinski jouer avec aussi peu d’entrain, Creton et lui forment un couple de méchants original, très « carpe et lapin » tant leur opposition surjeu/sous-jeu crée un effet surprenant, un peu comme si l’un était dirigé par Robert Bresson, et l’autre par Andrzej Zulawski. Une certaine concurrence leur est faite sur le terrain du ridicule par le personnage d'Egon, homme de main grimaçant de la secte, qui leur pique souvent la vedette en multipliant les méfaits, notamment le meurtre du chien de Jenny.



Creton et Kinski, l'auguste et le clown blanc.


Egon, le véritable "fermier serial killer" du film.


Le même, venant de vampiriser le toutou.


Ciel, mon chien !



Après le meurtre du canidé, Don mène l’enquête ; s’ensuivent divers chassés-croisés avec la secte des druides agriculteurs, avec des effets gore ratés et une pincée d’ésotérisme à la sauce Almanach Vermot, tandis que la police s’intéresse à l’affaire avec un singulier manque d’efficacité.


Un shérif d'une rare incompétence, particulièrement peu motivé par la misère du décor de son commissariat. Pour la petite histoire, le rôle était joué par le voisin du réalisateur, qui prêta également son pavillon pour le tournage de nombreuses scènes.




Disons, pour résumer, que le réveil de l'espèce d'albinos dans son bocal nécessite une "hôte de sang" parfaite, dont le sang serait compatible avec celui de la déesse, qui a la faculté de gonfler de volume lorsqu’il est mêlé avec du sang non compatible. Evidemment, c’est la jeune première qui va s’y coller ; le jeune héros parviendra-t-il à la sauver malgré sa tête de nœud ? Les flics vont-ils enfin arrêter de se tourner les pouces ? Le méchant va-t-il arrêter de cabotiner comme un malade ? Sans trop vouloir en révéler, disons seulement que le final repousse très (très) loin les limites du ridicule.


Un exemple du jeu d'expression de Paul Craig Jennings.


Une scène de sacrifice humain qui semble tournée par des étudiants en médecine ivres morts.



« Invasion of the Blood Farmers » déçoit rarement : à la débilité du scénario répond une indigence technique de tous les instants ; effets spéciaux bidon, mise en scène misérable, décors au-delà de la pauvreté. On ne dirait pas comme ça, mais le générique compte des « pointures » du Z ricain : Michael Findlay et son épouse Roberta (un gentil couple spécialisé dans le porno, qui tourna également entre autres le sordide « Snuff », un faux snuff movie assez lamentable qui rentra dans l’histoire grâce à une campagne qui tentait de le faire passer pour authentique), également associés à Ed Adlum pour « Shriek of the mutilated », s’occupent respectivement du montage et de la photographie. Le moins que l’on puisse dire est que l’un et l’autre se montrent particulièrement lamentables : les faux raccords sont si nombreux qu’on ne les remarque même plus, et la photo surexposée renforce encore l’impression de pauvreté de l’ensemble. Malgré un rythme parfois hasardeux (le montage expert de Michael Findlay est à nouveau à créditer), l’œuvre de Ed Adlum demeure un grand moment du mauvais cinéma d’horreur, si mal foutu qu’il réussit à paraître encore plus misérable qu’il ne l’était sans doute réellement et, en tout cas, suffisamment délirant dans sa bêtise pour retenir l’attention des fins gourmets du nanar.


Avec des héros comme ça, on voudrait voir gagner les méchants.


- Isatis -
Moyenne : 3.50 / 5
Isatis
NOTE
4/ 5
Nikita
NOTE
3.5/ 5
MrKlaus
NOTE
3.5/ 5
Jack Tillman
NOTE
3/ 5

Cote de rareté - 4/ Exotique

Barème de notation


Inédit en France, le film a connu une longue periode d’oubli et de purgatoire, avant d’être redécouvert par les bonnes âmes de Retromedia, qui lui ont offert une jolie réédition DVD, avec transfert caca en prime, dans leur collection « Night Owl Theater ». Disponible malheureusement en Zone 1 seulement, ce disque offre une très dispensable introduction par le réalisateur Z Fred Olen Ray, qui présente le film en compagnie de deux bimbos. Allergiques à l’humour beauf s’abstenir !