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Cheeseburger film sandwich

(1ère publication de cette chronique : 2008)
Cheeseburger film sandwich

Titre original :Amazon Women on the Moon

Titre(s) alternatif(s) :Aucun

Réalisateur(s) :Joe Dante, Carl Gottlieb, Peter Horton, John Landis, Robert K. Weiss

Année : 1987

Nationalité : Etats-Unis

Durée : 1H25

Genre : Ca fait du bien par où ça passe

Acteurs principaux :Sybil Danning, Russ Meyer, Paul Bartel, Carrie Fisher, Monique Gabrielle, Steve Guttenberg, Michelle Pfeiffer, Rosanna Arquette, Steve Forrest, BB King, Arsenio Hall, Henry Silva

John Nada
NOTE
B.F./ 5


Une affiche surchargée qui illustre bien le généreux fourre-tout du film.

Coupons court à la polémique, levons d'emblée tout malentendu : non, « Cheeseburger film sandwich » n'a rien d'un gros nanar idiot et maladroit comme ceux dont on vous parle régulièrement sur ce site, et s'il figure aujourd'hui sur Nanarland, c'est dans cette catégorie bien spécifique dans laquelle nous évoquons ce qu'on désigne parfois sous le terme sibyllin de "nanars volontaires", c'est-à-dire les films à l'esthétique délibérément kitsch, les parodies-hommages jouant plus ou moins habilement avec les codes du cinéma bis, des oeuvres aux titres aussi puissamment évocateurs que « Le Retour des Tomates Tueuses », « L'Attaque de la Moussaka Géante » ou « Killer Klowns From Outer Space ». Achevons à grands coups de latte ce qu'il reste d'ambiguïté : oui, nous considérons donc « Cheeseburger film sandwich » comme un "bon film", dans le sens où il fait rire à dessein et non à ses dépens, et sa présence ici tient essentiellement à son côté "pastiche de nanars" et un ton qui, un peu comme ce site entend humblement le faire, se moque gentiment de ce que le cinéma de genre et la télévision ont pu produire de plus ringard.








Forrest J. Ackerman, alias Mr. Science Fiction, fondateur du magazine "Famous Monsters of Filmland" en 1958. De nombreux réalisateurs ayant percé dans les années 1970-80 furent des lecteurs assidus de cette revue durant leur jeunesse, et louèrent Ackerman pour avoir su leur transmettre sa passion du cinéma.

Le concept de l'oeuvre est à la fois simple et propice à toutes les folies : il s'agit d'un film à sketches, dont les différentes séquences s'enchaînent pour former au final un gigantesque zapping télé reconstitué. A partir de là, place à l'imagination... Avalanche de fausses pubs joyeusement débiles (inoubliable "Première Dame de nuit"), de parodies de sitcoms, de "late shows" et de gags montypythonesques : « Cheeseburger film sandwich » est une ode cordiale au meilleur du pire de la télévision, un hommage à la pop-culture cathodique noyant le spectateur dans un véritable maelström de situations absurdes et d'humour roboratif. A titre d'exemple, dans quelle autre oeuvre du patrimoine culturel mondial peut-on voir :
- Sybil Danning en reine des Amazones de la Lune ?

- Henry Silva en présentateur d'une émission de faits divers façon "Mystères" expliquer que Jack l'Eventreur et Nessy, le monstre du Loch Ness, n'étaient qu'une seule et même personne, reconstitution saisissante à l'appui ?




Un monstre du Loch Ness qui semble tout droit sorti de « The Loch Ness Horror », sorti en 1981.


- Michelle Pfeiffer accoucher d'un Monsieur Patate ?



- Russ Meyer en gérant avisé de vidéo-club conseiller les jeunes célibataires du samedi soir en programmes personnalisés ?

- Monique Gabrielle dans le plus simple appareil ? (oups, pardon, on me souffle dans l'oreillette qu'elle se foutrait à poil dans tous ses films, quand elle ne fait pas en plus du karaté comme dans « Silk 2 »)

- La princesse Leia (Carrie Fisher) consulter le réalisateur des « Seigneurs de la route » (Paul Bartel) pour une MST, dans une hilarante parodie des films d'éducation moralisateurs que finançaient jadis les ligues de vertu ?




Un sketch qui semble pasticher plus précisément « Sex Madness », film de sexploitation de 1938 traitant des maladies vénériennes.

- Des Noirs qui chantent et swinguent comme des Blancs ?



- Rosanna Arquette consulter le pedigree relationnel de Steve Guttenberg ?

- Des pirates de la vidéo partir à l'abordage du navire d'un éditeur de VHS ?



- Un téléspectateur bidochonesque se téléporter de programme en programme ?




Mais... mais... c'est Antonin Lespinasse !?!

...et un luxe d'autres réjouissances inattendues qu'on aurait bien du mal à imaginer sur grand écran aujourd'hui, les délires azimutés de Matt Stone et Trey Parker exceptés. Un des éléments moteur de ce cocktail gloubiboulgesque, c'est bien évidemment la nostalgie (celle, en vrac, des serials, des vieux shows télé et de la science-fiction à deux sous) mais une nostalgie qui n'est pas contemplative, mélancolique et larmoyante. Loin de la rengaine stérile du "c'était mieux avant", cette nostalgie reste toujours positive pour servir de catalyseur à un film qui, s'il s'avère être un bel hommage, n'oublie jamais d'être divertissant. On se plaît ainsi à deviner, cachée sous une triple épaisseur d'oripeaux loufoques, l'intelligence singulière d'une oeuvre qui, pendant 1h30, parvient à maintenir le cap entre les tourbillons d'une frileuse obséquiosité et les écueils d'une raillerie condescendante. « Cheeseburger film sandwich », ou comment faire revivre les programmes de SF des années 30 aux années 60 avec un esprit 80's !




Poussières et rayures sur l'écran, images qui sautent, pellicule qui fond : une patine qu'on retrouvera 20 ans plus tard dans le « Grindhouse » du duo Tarantino/Rodriguez.

Je n'aurais ni la place ni la prétention d'énumérer ici toutes les références et clins d'oeil que contient ce film (et dont d'ailleurs je devine qu'un bon nombre m'échappe, sans que mon plaisir de spectateur en pâtisse pour autant). A titre d'exemple, le sketch intitulé « Amazon Women on the Moon », qui sert de fil rouge et donne son titre au film en VO, évoque ainsi « Queen Of Outer Space » (1958), avec des bouts de « Cat-Women Of The Moon » (1953), de « Missile To The Moon » (1958), et des costumes de « Planète interdite » (1956).







Le titre français « Cheeseburger film sandwich » fait lui écho à un autre film à sketches proche dans l'esprit, « Hamburger film sandwich » (« The Kentucky fried movie » en VO), orchestré dix ans plus tôt par John Landis (déjà) et produit par le trio Zucker-Abraham-Zucker (la saga des « Y a t-il...? »). Egalement co-produits par Robert K. Weiss, les deux films sont en fait tellement proches qu'on les associe (et les confond) très souvent.

« Cheeseburger film sandwich » est avant tout une réussite collective : outre un casting absolument royal à même de combler les geeks et les bisseux, la paternité de ce film se partage entre 5 réalisateurs et 2 scénaristes, parmi lesquels on citera John Landis et le très apprécié Joe Dante, dont je ne vous ferai pas l'affront de rappeler ici le flamboyant pugilat artistique (pour la ménagère du fond, l'homme qui a vécu dans une grotte ces 30 dernières années et le lecteur amnésique, je vous renverrai simplement vers la filmographie de ces messieurs sur l'IMDB). Si, comme dans tout film à sketches, les différents segments proposés s'avèrent assez inégaux en termes d'intérêt et de réussite, ils s'enchaînent néanmoins avec suffisamment de rythme pour que l'ensemble reste percutant.


Traitement capillaire révolutionnaire...

...roman de gare outrageusement racoleur...

...nourriture rigolote (référence au Silly Putty, un jouet hyper-populaire dans l'Amérique des années 50). De faux spots publicitaires qui raillent nos habitudes d'Homo sapiens post-modernes obnubilés par les joujoux colorés du consumérisme.

Comme souvent chez des réalisateurs comme Dante et Landis, le ton est volontiers à la satire, parfois grinçante mais jamais vulgaire, s'attaquant essentiellement aux mondes des médias, de la pub, du cinéma et aux travers de nos comportements sociaux, avec un sens certain de l'auto-dérision. Signalons que ce refus systématique de se prendre au sérieux est magnifié par une VF complètement déjantée, tout à fait dans l'esprit de l'oeuvre, où l'on retrouve la fine fleur des doubleurs 80's qui semblent tous s'en être donné à coeur joie (mais... pourquoi avoir renommé le personnage de Henry Silva "Jean-Roger Silva" ???). Iconoclaste, absurde, délirant, unique, psychotronique et indiscutablement plus fort que du roquefort, « Cheeseburger film sandwich » reste un petit bijou dont l'éclat devrait séduire le néophyte autant qu'il ravit les cinéphages et les télévores les plus endurcis.




Sybil, laisse-moi être ta chose !

- John Nada -
Moyenne : 0.00 / 5
John Nada
NOTE
B.F./ 5
MrKlaus
NOTE
B.F./ 5
Labroche
NOTE
B.F./ 5
Wallflowers
NOTE
B.F./ 5
Peter Wonkley
NOTE
B.F./ 5
Jack Tillman
NOTE
B.F./ 5

Cote de rareté - 3/ Rare

Barème de notation

Si en France « Hamburger film sandwich » (« The Kentucky Fried Movie ») a bénéficié d'une ressortie sur support DVD chez Wild Side Vidéo, ce n'est pas encore le cas de « Cheeseburger film sandwich » (« Amazon Women on the Moon »). Il faudra donc se tourner vers l'édition DVD américaine, assez complète puisqu'elle propose le film en langue anglaise ou espagnole, avec sous-titres anglais, espagnols et français, ainsi que des bonus allant de l'anecdotique (un bêtisier éclair) à l'essentiel (la bande-annonce et surtout les scènes et les sketchs coupés).

Par contre, pour profiter de la savoureuse version française, il faudra guetter un hypothétique passage télé ou tâcher de mettre la main sur une des vieilles éditions VHS d'époque éditées par CIC, la collection d'Universal.